Enfant en danger : quand faut-il intervenir ? |
Voisins, parents, amis, nounous... Lorsqu’il nous semble qu’un enfant court un danger ou risque d’en courir un, nous avons des droits et devoirs. Et des démarches à accomplir.
Pauline est inquiète. Dans la maison voisine, elle entend souvent des cris, des enfants qui pleurent. Elle ne sait que faire. Josette, elle, se fait du souci pour son petit-neveu qu’elle voit souvent avec des bleus. Selon sa famille, il tomberait régulièrement, mais elle finit par douter.
Quoique différentes, ces situations conduisent à se poser la même question : quand faut-il s’alarmer ? Lorsque l’enfant est en danger ou qu’il risque de l’être, répond clairement la loi (loi n° 2007-293 du 5 mars 2007)… Peu importe la forme de ce danger.
Pour agir, appelez le 119 (appel gratuit) ou cliquez sur www.allo119.gouv.fr.
Violences physiques, psychologiques ou négligences
Il peut résulter de violences physiques (coups et blessures), explique un responsable de la ligne 119 Allô enfance en danger. Toutes les gradations sont alors possibles, y compris la claque ou la fessée infligée dans certains contextes.
Mais aussi de violences psychologiques (menaces répétées, chantages, insultes, brimades, humiliations verbales, dévalorisation systématique), sexuelles (climat équivoque, non-respect de l’intimité de l’enfant, parents exhibant leur sexualité, attouchements, viol), ou encore de négligences lourdes (dénutrition, absence de soins médicaux ou d’hygiène, etc.).
L’enfant qui connaît des conditions d’existence difficiles, au point de voir sa santé, sa sécurité, sa moralité, son éducation ou son entretien compromis, est aussi un enfant en danger, sans pour autant qu’il soit victime de maltraitance à proprement parler.
Si je ne fais rien, suis-je coupable ?
L’article 223-6 du Code pénal s’applique à tous. Cette disposition sanctionne de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende quiconque s’abstient volontairement d’empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l’intégrité corporelle d’une personne.
Il punit des mêmes peines celui qui s’abstient de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en alertant les secours.
Intervenir le plus tôt possible pour aider un enfant en danger
"L’objectif est de centraliser les informations et de prendre en charge l’enfant le plus tôt possible, souligne un responsable du 119. Tel sera le cas, par exemple, si les conditions de son éducation sont défaillantes ; ou si ses parents sont confrontés à des problèmes économiques, psychologiques qui engendrent des difficultés pour lui."
Une prise en charge peut aussi être proposée aux familles dont les enfants se mettent en danger par des comportements addictifs, des fugues, des tentatives de suicide, des pratiques sexuelles à risque…
Quelle que soit la situation, le bon réflexe est "de rencontrer les parents pour essayer de discuter avec eux. Il s’agit de leur faire part des difficultés que l’on perçoit pour leur enfant. Il arrive que certains parents n’aient pas conscience de l’engrenage dans lequel ils se trouvent. Une main tendue peut suffire. C’est un geste civique de base."
Une démarche peut rester anonyme
Pour autant, cette démarche n’est pas simple. peur de s’immiscer, de ne pas trouver les mots… Si vous ne vous sentez pas capable d’agir mais êtes persuadé qu’un enfant de votre entourage court un danger, contactez le 119, un numéro gratuit, accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept.
Pour permettre aux services du département d’agir auprès d’un enfant en danger, des éléments permettant l’identification du jeune doivent être donnés. Mais si vous appelez le 119, vous avez tout à fait la possibilité de présenter la situation de manière anonyme, c’est-à-dire sans préciser qui vous êtes.
Il n’est pas rare toutefois qu’au fil de la conversation des éléments d’identification soient communiqués. Ce sera le cas si, en parlant d’un enfant, vous le présentez comme votre petit-neveu, par exemple. Dans cette hypothèse, ne vous affolez pas, vous avez la possibilité de demander aux écoutants de la ligne de conserver votre anonymat même s’ils estiment qu’il est nécessaire de faire remonter les informations au département.
Le tri des appels
Un premier tri des communications sera opéré en fonction de l’objet de l’appel : demande d’information, dénonciation d’une situation, inquiétude particulière pour un enfant… Selon le cas, vous serez mis en contact avec des écoutants (psychologues, juristes ou professionnels de l’enfance).
S’ils jugent les renseignements que vous leur fournissez suffisamment "inquiétants", ils les transmettront sans délai au département dans lequel vit l’enfant, plus précisément à une "cellule de recueil, de traitement et d’analyse des informations préoccupantes ". Cette dernière chargera éventuellement le service le plus adéquat de procéder à une appréciation un peu plus poussée de la situation. "Il peut s’agir de la puéricultrice de la protection maternelle et infantile pour un enfant de moins de 6 ans, d’une assistante sociale scolaire…", précise la responsable d’Allô enfance en danger.
Un panel de solutions pour un enfant en danger
À l’issue de cette évaluation par l'équipe du 119 Allô Enfance en danger, si cela s’avère nécessaire, les services départementaux de l’aide sociale à l’enfance mettront en place des mesures pour soutenir la famille de l’enfant (après avoir recueilli l’accord des parents). À cette occasion, plusieurs aides peuvent être proposées.
L’aide éducative à domicile est une aide socio-éducative individualisée afin d’épauler la famille dans l’éducation de l’enfant. Ponctuellement, il existe également des mesures d’aide financière. Si la situation s’avère vraiment délicate, l’enfant pourra être provisoirement accueilli, avec l’accord de ses parents, hors de son domicile (dans un foyer, chez une assistante familiale ou encore dans un institut adapté à ses besoins). Des placements modulés sont également possibles en fonction de l’évolution de la situation familiale.
Malheureusement, ces mesures administratives se révèlent parfois insuffisantes. C’est pourquoi, en cas d’échec, les services du département conservent la possibilité de procéder à un signalement, directement auprès du procureur de la République, à charge pour lui de saisir ensuite le juge des enfants. Ce sera le cas également si les services administratifs se trouvent dans l’impossibilité d’évaluer la situation parce que les parents refusent, par exemple, d’ouvrir leur porte ou s’arrangent pour que l’enfant soit absent pendant les rendez-vous.
L’assistance éducative
Débute alors la procédure dite d’assistance éducative. Le magistrat convoque les parents, l’enfant et généralement la personne à l’origine du signalement. La famille a accès au dossier par le biais du greffe.
Avant de prendre sa décision, le juge décide parfois de diligenter une enquête sociale. Un travailleur social, appartenant le plus souvent à une association habilitée, tente de vérifier les conditions d’hébergement de l’enfant, son mode de vie, la capacité de ses parents à sortir de leurs difficultés. Il peut également mettre en œuvre une mesure d’investigation et d’orientation éducative menée par une équipe comprenant un travailleur social, un psychologue et un psychiatre.
Lorsqu’il a toutes les cartes en main, le magistrat opte pour la mesure la plus pertinente, en s’efforçant d’obtenir le consentement des parents (mais il peut aussi passer outre). S’il privilégie la mesure d’aide éducative en milieu ouvert, un travailleur social suit alors plus particulièrement l’enfant, qui demeure au sein de sa famille. Mais le juge peut aussi ordonner un placement provisoire et confier le jeune à un tiers extérieur. Entre les deux, des dispositifs modulés restent ouverts (accueil de jour, accueil exceptionnel pendant une période de conflit…). La mesure peut ensuite être révisée à tout moment.
Contacts
Par téléphone : 119 (appel gratuit).
Par Internet : sur www.allo119.gouv.fr, vous pourrez trouver les coordonnées d’associations œuvrant pour la protection de l’enfance dans votre département.