Le Tai-sabaki, par Kyuzo Mifune
Conseils pour apprendre le Jùdô
et l’art du « Taisabaki
».
Ceux qui apprennent le jùdô,
ne doivent pas seulement entraîner leur corps, mais aussi cultiver leur
esprit, à travers la pratique de cet art de self-défense.
En bref ils doivent comprendre par leur propre expérience que le jùdô
est à la fois un principe moral
et technique.
Je vais maintenant vous donner quelques vues qui peuvent vous être utiles
pour apprendre le Jùdô. Vous
ne devez pas être paresseux, fier, avide, préoccupé ou distrait
; en d’autres termes, vous devez être sincère. Ceci est le
« Kokoro » ou l’essence
du Jùdô.
Le mot japonais « Kokoro »
signifie littéralement « obtenir l’esprit », c'est-à-dire,
cultiver et conserver l’esprit qui n’est jamais troublé même
dans un cas d’urgence.
Ceci peut paraître personnel, mais cette vertu peut à la longue
affecter le pays d’un homme qui la possède ou ne la possède
pas.
« Kokoro » qui, en japonais,
signifie l’esprit ou le centre, est le plus important dans tous les cas.
Il existe naturellement et n’est pas « fabriqué » par
l’homme. Il repose au centre, la place la plus importante. Le centre est
l’endroit où le « Kokoro
» demeure.
« Kokoro » par conséquent
est le centre. Chaque chose a son centre. Sans « Kokoro
» les choses n’existent pas.
Les choses sont « Utsuwa » ou vaisseaux, réceptacle dans
lequel « Kokoro » est déposé.
Quelquefois, l’humain est appelé « Utsuwa » parce qu’il
a un esprit en lui.
« Kokoro » ne se voit pas,
mais apparaît sous la forme de réceptacles. « Kokoro
» ou le centre des choses est « Michi » qui signifie «
route, chemin » ou « méthode ».
« Michi » apparaît sous la forme de « Jutsu »,
l’art ou la technique.
Si vous suivez « Michi » et si vous raffinez, polissez votre «
Jutsu », le processus est tout à fait naturel et de grands résultats
sont obtenus.
« Jutsu » et « Michi » marchent ensemble, c’est
la loi de la nature.
Pour être sincère dans
la vie humaine, l’on doit remplir les conditions dans tous les cas. Si
l’art du Jùdô est pratiqué
en tenant compte de ces principes de sincérité, le Judo ne pourra
jamais être galvaudé.
Au contraire, si vous êtes esclaves de votre émotion, et faites
un mauvais usage du Jùdô, vous
serez accusé par le public et conséquemment vous disgracierez
le Jùdô.
C’est pourquoi les « conducteurs » du Jùdô
disent toujours « Être fort dans la technique du Jùdô
n’est pas suffisant ». Si la force est valable en Jùdô,
c’est parce que la force est basée sur la sincérité.
Les principales connaissances que nous pouvons acquérir par l’emploi
de nos yeux et de nos oreilles, ne descendent pas profond dans notre caractère.
La véritable compréhension est acquise seulement par la pratique.
Les mots qui parlent à travers l’expérience ont de la valeur.
C’est pourquoi les paroles de MYAMOTO
MUSASHI sont encore vivantes dans notre génération.
« Par la pratique du Jùdô,
l’homme peut trouver sa vérité propre ».
Je vais maintenant dire quelques mots sur les techniques du Jùdô
en insistant plus particulièrement sur « Tai
sabaki » qui est le fondamental pour toutes les techniques.
Les gens pensent généralement que « Tai
sabaki » signifie simplement « conduire le corps », mais
à mon avis, je pense que «
Tai sabaki » est un art consommé
en lui-même.
« Tai sabaki » est le
mouvement fondamental pour marcher en avant, en arrière, etc, et qui
conserve notre corps tout entier en état d’équilibre.
Vous devez devenir maître de cet équilibre par une pratique constante,
et en faire usage si nécessaire.
« Tai sabaki » est tout
ce qu’il y a de plus naturel, par conséquent, un mouvement tout
à fait ordinaire, mais en lui repose le secret du Jùdô.
Si vous travaillez dur pour mouvoir votre corps avec rapidité, vous serez
capable de détourner les dangers et capable aussi de prendre l’initiative
à la fois dans l’attaque et dans la défense.
« Tai sabaki » ne doit
jamais être ignoré.
Du point de vue de l’application scientifique des principes du Jùdô,
le Jùdô peut être appelé
l’art du « HEN-O » ou du meilleur mouvement à chaque
instant.
Il est important de posséder ceci à l’esprit « HEN-O
» est l’état mobile de l’esprit lorsque l’ennemi
est près. Si vous manquez d’attention vous serez sûrement
battu. « Faites toujours face à votre ennemi, mais ne faites jamais
face à son attaque ». Ceci est le « HEN ».
Si vous n’êtes pas très vigilant, votre technique ne pourra
être exécutée avec succès.
Attaquez sans faiblir lorsque vous avez noté le moment pendant lequel
l’ennemi n’est plus sur ses gardes. Ceci est le « O ».
Dans le cas où des ennemis vous environnent de toutes parts, observez
celui qui est le plus près, et exécutez sur lui aussitôt
l’art qui vous est propre.
Ce « HEN » et ce « O », cependant, ne sont pas des techniques
séparées. La position de « HEN » en un instant en
celle de « O ». Les deux mouvements sont inséparables et
se répètent sans intervalle.
L’on doit dire que cet art du « HEN-O » est une variation
ou une application du « Tai sabaki
» mentionné plus haut. De façon à obtenir victoire,
toute personne doit choisir la meilleure méthode.
Jùdô signifie employer la force
de la pensée et du corps de la façon la plus efficace. Il faut
l’intention d’avoir le maximum d’effet par le minimum de force.
En d’autres termes nous pouvons dire : Jùdô,
c’est avoir une grande réserve de force.
Quand notre force est fixée à un point elle doit être aussi
ferme que le roc et quand le mouvement est porté, il doit être
aussi rapide que le vent. Si l’attaque de votre adversaire est rude, vous
la recevez mollement, et si un autre se déplace légèrement,
vous le traitez avec la même légèreté. Ainsi vous
vous adaptez à l’adversaire mais en le contrôlant, en réalité.
L’art du « Tai sabaki
» est toujours nécessaire, non seulement en apprenant le Jùdô
mais aussi dans notre vie. C’est la première et la dernière
marche du Jùdô.