Les types d'entraînement

Le secret de la réussite en compétition ?
S'entraîner sans traîner !

La mise au travail propre au jùdô est un aspect important que tous les jùdôkas connaissent et généralement plus appris par observation (mitori) que par énoncé explicite.

Il existe différents types d'entraînement pour les adultes et les adolescents confirmés :

I. Tandoku Renshù (de tandoku, seul et renshùru pratique) : Ensemble des exercices effectués seul. C'est une répétition d’une attaque en imaginant la position de son adversaire. Il nécessite un travail de concentration et de représentation mentale, améliore l’équilibre. Il est aussi appelé Shadow Uchi-komi ou jùdô contre l'ombre. Il constitue une bonne approche de départ mais ne doit pas être trop répéter du fait de la non mise en situation réélle notamment au niveau de la mise en déséquilibre. Le jeux des animaux.
Attention ! Un enseignement idéal tend à faire coïncider le plus possible la théorie à la pratique. Hors les arts martiaux sont l'art de la guerre et donc l'opposition entre au moins deux adversaires pensants et réactifs. Ignorer le rôle de l'adversaire est donc ignorer l'idée même du principe de base à savoir l'opposition à l'autre.
Même si les arts martiaux sont avant tout un travail sur soi, ils ne peuvent s'envisager qu'à travers le travail avec les l'autres. Un abus de ce type d'entraînement vous amènera à rentrer de nombreuses techniques (tsukuri-kuzushi) mais que vous ne parviendrez pas à engrener (kake) et donc projeter (nage) faute d'une habituation centré sur la réalité du combat c'est à dire le rapport à l'autre.

Mitori-geiko :
Entraînement par l'observation : on regarde les pratiquants s'entraîner en essayant de décoder les situations, d'évaluer leur performances, de remarquer pour soi-même leurs qualités et leur défaults personnels.

II. Sotai Renshu (de sotai, manipulation et renshuru pratique) : Ensemble des exercices effectués à deux. Il désigne également la description d’une technique avec partenaire. Explication des points clefs : déstabilisation, placement et mise en déséquilibre, engrenage, projection (tsukuri, kuzushi, kake, nage). Uke est la pour aider Tori.Uke chute sans résister si l’attaque portée lui paraît bonne.

Déplacements en sotai renshu :
Ken Ken
: Progresser en sautant sur le pied d'appui.
Oikomi (en entrant, en avançant, en poursuivant) c'est à dire en accompagnant le partenaire qui recule
Hikidashi : (en se retirant, en reculant) c'est à dire en accompagnant le partenaire qui avance
Tobikomi / Tobi-Ashi (plonger) Il s'agit de bondir sur l'adversaire en plaçant d'abord la ou les jambes d'appui(s)

       IIa. Uchi-komi : marteler ("uchi" frapper perpendiculairement et "komi" pénétrer profondement) ou butsukari renshû (de butsukaru percuter, se heurter contre) : Exercice où Tori forme son corps et son cortexte moteur et sa sensibilité au cœur d'une technique et adapte cette technique à sa forme de corps, jusqu'à ce que les deux soient indissociables par la répétition scrupuleuse de toutes les étapes que sont le tsukuri (placement et mise en déséquilibre) et le kuzushi (le déséquilibre) de la posture de uke), sans jamais lacher le même kumi-kata spécifique à la technique. Même si Tori peut parfois faire décoler Uke, le kake n'est jamais atteint afin de ne pas casser le rythme et de permettre plus de travail sur les deux phases précédentes. Uke doit aider Tori à progresser et ne pas être une cause de gène ou de désagrément (taijin kyofusho).. Il peut se faire en statique ou en déplacement, debout ou au sol, seul (hitori uchi-komi), à deux avec un tori et un uke constant, à deux en alternant tori et uke (kogo uchi komi), à trois (san-nin uchi-komi). Le but est de perfectionner son placement et la mise en déséquilibre. Il faut arriver à faire le plus de répétitions correcte dans un même laps de temps. Si la technique n'est pas totalement acquise avant, cet exercice peut s'avérer néfaste puisqu'il va automatiser de mauvais placements ou positions. Le jeux du musée Grévin est un très bon jeu pour effectuer les Uchi-komis.
                  IIa1. Kogo Uchi-Komi : Uchi-komi en alternatif . Une fois Tori, une fois Uke.
                  IIa2. San-nin-Uchi-Komi : Uchi-komi réalisé à trois : Un troisième partenaire retient Uke. Permet de travailler sur la puissance musculaire.
                  IIa3. Ido-Uchi-Komi : Uchi-komi en déplacement linéaire.
                  IIa4. Butsukari : Tori rentre avec une résistance d’Uke. La résistance est raisonnée afin de permettre à Tori d’entrer dans de bonnes conditions. Uke met une résistance au niveau de la saisie.
Les Uchi-komis ne sont intéressant qu'à partir d'une certaine maîtrise technique c'est à dire le plus souvent de la catégorie benjamin afin de ne répéter que des techniques correctement effectuées.

Un Uchi-komi ne se fait que sur une seule technique non encore totalement maîtrisée. Il peut également se faire sur plusieurs (2 ou 3 ou plus selon le niveau) techniques maîtrisées.

       IIb. Nage Komi ("nage", projeter et "komi", pénétrer) est l'exercice de répétition des projections. Tori travail spécifiquement la projection (nage) d'un même mouvement. Tori rajoute au travail du Uchi-komi la saisie systématique du kumi-kata (saisie du judogi) et le nage (la projection). Uke travail les ukemis Il peut se faire en statique ou en déplacement.

       IIc. Kakari Geiko (du verbe kakaru "s'accrocher" (hikkakaru) et "sauter sur quelque chose" (tobikakaru) exprime la constance et la rage) : Tori attaque à fond en déplacement en variant les techniques tandis que Uke se défend du mieux possible sans chercher à contrer mais en esquivant (tai-sabaki). Il développe de l’esprit offensif ou défensif du jùdôka.

       IId. Kata : Il s'agit d'ensembles d'enchaînements de séquences techniques d'attaque et de défense codifiés transmis à travers le temps qui joue un rôle de garde fou et contenant le cœur du jùdô.

       IIe. Yakusoku Geiko : Mise en application (geiko) conventionnel (yakusoku)
Les attaques/défenses ne sont pas prévus mais des consignes sont imposées.
- Il est appellé "randori souple" lorsqu'il s'agit d'un travail souple Tori et Uke change de rôle selon les opportunités en enchaînant les séquences techniques d'attaque et de défenses. Cette exercice est résume en soi toute la valeur éducative du jùdô à savoir Tori qui doit illustrer le principe du bon usage de l'énergie (seiryoku zenyo) et Uke celui de l'entraide et la prospérité mutuelle (jitai kyoei).
- Il est appelé "randori à thème" lorsqu'il s'agit d'un travaille à partir d'une position de départ ou la restriction à certaines techniques ou tactiques.
Patrick Roux, formateur de l’École Française de Jùdô Jùjutsu traduit le yaku soku geiko comme « un exercice de promesse ». Cela veut que chacun offre à l’autre sa complicité active, d’un état d’esprit positif et concentré sur l’esprit de l’exercice.
C’est une discussion ouverte :
Dans le yaku soku geiko, il n’y a plus de Tori et de Uke. Les partenaires s’offrent mutuellement avec une posture dynamique totalement ouverte et relâchée, sans pression, chacun des deux prenant spontanément l’initiative ou réagissant à celle de l’autre. Totalement libre, tant physiquement que mentalement, les partenaires peuvent se concentrer sur les éléments de l’interaction dynamique : rythme, distance, déplacement et kumi kata. Saisie rapide et soudaine accélération, changement de rythme, confusion, enchaînement d’une technique de jambe avec une technique d’épaule, simulation d’une attaque à droite avant une technique à gauche, esquive d’une attaque adverse et reprise d’initiative… Les chutes fréquentes (car la défense n’est pas un objectif), récompensent chaque mise en action dynamique réussie.
C’est aussi la mobilité :
Le yaku soku geiko est l’exercice privilégié pour travailler dans la mobilité et le relâchement. La dimension très mobile de cet exercice en fait le meilleur moyen d’apprendre à sentir et à maîtriser « dans son corps » les éléments essentiels d’un jùdô dynamique, d’augmenter rapidement ses capacités de déplacement, de changements d‘appui et d’esquive, d’améliorer la qualité de sa posture.

       IIf. Randori (bagarre (ran) maîtrisée (dori) : Il n'y a plus consignes données. Il faut travailler dans une totale liberté d'esprit et de corps, sans l'appréhension d'être projeté ou de perdre, attaquer le plus fort et le plus souvent possible. Un randori est comme un combat en compétition dans lequel chacun des combattants est perpétuellement en train de perdre par waza-ari. Si personne ne fait tomber l'autre alors chacun des combattants perdent. Chaque combattant doit également faire comme si son adversaire était plus fort que lui-même. L'idéal serait de combattre à terme en ne faisant plus attention qu'à ses propres sensations sans se préoccuper de sa technique où même à la technique de l'adversaire. À ce niveau de maîtrise, les ripostes deviendraient alors instinctives.
           Tate (inviter) aussi Kake jiai aussi motodashi-geiko (rare) : Il s'agit d'un Randori particulier où les adversaires d'un même combattant sont changés régulièrement par des jùdôkas reposés. Cet exercice permet de travailler l'endurance et surtout la résistance.

III. Shiai : ("shi", avant "mort" et aujourd'hui "épreuve" et "ai", rencontre) C'est la compétition, elle fait partie de la vie du jùdôka mais ne doit en représenter le but.
L'échec dans la compétition ne doit pas être une source de découragement ni de désespoir, mais un signe de besoin d'une pratique plus grande et d'efforts plus soutenus à l'entraînement...", Jigorô Kanô.
Tsukinami-Shiai :
Compétition individuel mensuelle permettant de classer les combatants en fonction de leur niveau. Le vainqueur du combat reste sur le tapis et affronte ses adversaires les uns après les autres jusqu'à ce qu'il perde ou qu'il face match nul.

Kohaku-Shiai : ("rencontres des rouges contre les blancs", dès 1884) Compétition par équipe mi-annuelle (mai et octobre) où le vainqueur du combat reste sur le tapis et affronte ses adversaires les uns après les autres jusqu'à ce qu'il perde où qu'il face match nul.

Mondo : Au delà de ce type d'entraînement physique existe ce que l'on appelle "mondo" (questions-réponses) qui doit toujours constituer une partie de l'entraînement afin de développer la connaissance culturelle, les structures administratives, l'analyse cognitif, didactique et règlementaire du jùdô.

La visualisation : Préparation mentale consistant à se représenter mentalement un série de gestes, de mouvements de tactiques ou de stratégies afin d'entraîner la réussite d'une action.

Comment pratiquer la méthode jùdô Kanô Kôdôkan
Jigorô Kanô propose quatre éléments de pratiques pour que le jùdô soit source de bienfait.

1) Kogi (la connaissance) : cours magistral, conférences, lectures, explications sur la technique du jùdô, la philosophie, politique, société, randori, attitude, éthique, éducation, discours moral, principe d’une technique, sens du kata, sens du jùdô, la bonne façon de se comporter dans la vie en tant que membre du Kôdôkan ou en tant qu’homme. Jigorô Kanô propose des kogi pour ceux qui connaissent le jùdô et des kogi pour informer les personnes qui ne pratiquent pas.

2) Mondo (la réflexion) : exercices de questions réponses. Les élèves et les professeurs posent et répondent aux questions. Cela permet de vérifier si les pratiquants ont compris et de mesurer le degré de connaissance dans l’étude du jùdô.

3) Kata (le savoir) : série de techniques dont l’ordre et les situations sont codifiées. En pratiquant le jùdô comme méthode d’attaque et de défense, il ne faut pas négliger les moyens de maîtriser ou de tuer l’adversaire. Dans le randori tout ce qui est dangereux est interdit. C’est par le kata qu’on peut s’exercer à ces aspects (atemi, attaques avec armes...) avec peu de risque de blessures. Il permet d’habituer le corps aux attitudes, déplacements et gestes du jùdô. Tout ce travail technique dépend de la connaissance de celui qui le transmet.

4) Randori (le savoir-faire) : cela fait travailler tous les muscles et permet de s’adapter aux circonstances, le randori est une éducation physique et un exercice aux méthodes de combat. Les deux partenaires essaient de mettre en application les principes du jùdô en respectant les consignes (respecter la posture shizen-tai, les étapes de la projection : tsukuri, kuzushi, kake, nage et interdiction des techniques dangereuses, avoir une bonne attitude et un bon comportement) sinon rien n’est codifié, chacun étant libre de ses attaques et défenses. En randori, le choix de la faiblesse est essentiel. Il ne s’agit pas de s’imposer à l’autre par la puissance musculaire. Il convient de chercher d’autres voies, plus élaborées qui toutes doivent répondre au principe : seiryoku zen yo (l'habile et bonne utilisation de l’énergie). L’exercice qui consiste à ne pas opposer la force à la force est particulièrement difficile dans une situation de corps à corps, quand le poids, la force, la taille de l’autre s’imposent. C’est la situation la plus difficile que l’on puisse rencontrer et c’est dans cette difficulté maximale qu’il convient de trouver des solutions. Combattre sans utiliser sa puissance physique est un exercice subtil, difficile. En effet, le randori consiste à trouver des solutions techniques aux problèmes posés par l’autre, en fonction de son propre niveau d’expérience, d’habileté technique et son physique.

Le randori consiste à trouver des solutions techniques aux problèmes posés par l’autre, en fonction de son propre niveau d’expérience, d’habileté technique et physique... Il y a 3 façons de faire randori :
1) Avec partenaires de niveaux inférieurs : l’idée doit être d’aider son partenaire en contrôlant les techniques de façon à ce que les chutes ne soient pas désagréables tout en améliorant l’efficacité de ses techniques et en étudiant de nouvelles prises gokaku geiko (attaquer avec beaucoup de techniques variées).
2) Avec partenaires niveaux équivalents : travailler dans l’esprit du randori mettre toute son énergie dans l’attaque ; hikitate geiko (attaquer avec toute l’énergie)
3) Avec partenaires de niveaux plus élevés : ne pas utiliser sa force pour bloquer ou résister, mais seulement dans l’attaque. Cela sans tenir compte des projections que le partenaire peut réaliser shite geiko (attaquer sans crainte, le partenaire peut contrer ou attaquer).

On peut également ajouter l'entraînement par l'observation : mitori geiko.

Pour ce qui est du niveau enfant, débutant ou jùdô loisir le jeu est préférable par exemple selon 4 objectifs généraux :
Saisir et se déplacer
Mettre en mouvement et déséquilibrer
Projeter et enchaîner au sol
Défendre, retourner, renverser et immobiliser

N.B. : Shiai désigne aussi les tests d'efficacité autrement improprement appelés Shodans.

Promenades en jùdô
Par Yves Cadot

LES KOMIS
Viennent ensuite uchi komi et nage komi. Il y aurait beaucoup à dire sur cette idée de "komi" qui véhicule l'idée générale d'entrer ou de faire entrer, d'engouffrer, mais aussi d'entrer dans le complexe, de pénétrer les choses dans leurs plus fines subtilités. Uchi komi (uchi, l'idée de frapper perpendiculairement, et donc avec un maximum de force) c'est, par des frappes successives, faire entrer toute la matière dans un moule, dans une forme. C'est donc, par la répétition, à la fois former son corps à la technique, et aussi, peut être, adapter la technique à sa forme de corps, jusqu'à ce que les deux soient indissociables, en respectant scrupuleusement toutes les étapes que sont le tsukuri (contruction de notre position d'avantage et de la position de désaventage de notre partenaire), et le kake (placement spécifique de la technique). Nage komi, c'est faire un pas de plus et aller jusqu'à la projection. C'est donc maîtriser, s'approprier peu à peu, chaque fois plus habilement, plus subtilement tout le cycle, du kumi kata à la chute. C'est faire de ce processus, quelque chose qui nous soit constitutif.
LES GEIKO
Kakari geiko et yaku soku geiko sont des situations pédagogiques qui mènent vers le randori. Tous deux ont en commun l'idée de "geiko", ou plutôt keiko (le "k" est sonorisé en "g" dans l'expression) qui signifie de façon courante "exercer ce que l'on a appris" et est donc souvent traduit par "entraînement". Or, étymologiquement parlant, keiko signifie: réfléchir aux choses primordiales pour en comprendre la raison et le bon sens par la comparaison et l'expérience (kei, pour comparer et réfléchir, réfléchir et éprouver; ko, ce qui est primordial). Ainsi, les keiko sont donc une recherche du principe pur. Il est d'ailleurs important de noter que lorsque Jigoro Kano parle de pratiquer le jùdô, il emploie soit "shugyo" soit "keiko" (encore employé aujourd'hui), ce qu'il n'utilise jamais pour les jujutsu. Ainsi, venir faire du jùdô, ce n'est pas simplement s'entraîner, c'est chaque fois être à la recherche du principe. Kakari, quant à lui, signifie ce qui part d'un point et se diffuse pour recouvrir ce qui l'entoure. On peut dire que, dans kakari geiko, on isole un point, un principe, pour en approfondir la maîtrise et l'expérience par l'exercice,et que les vérités et qualités acquises par ce travail dépassent ce seul principe isolé pour éclairer la pratique entière. Mais c'est aussi, plus concrètement, partir d'une situation donnée et, de là, percevoir, étudier, expérimenter tous les développements possibles. Quant à yaku soku, cela signifie "promesse","accord préalable","entente" et même "rendez-vous". Il s'agit donc d'un exercice au thème exprimé et où chacun va jouer son rôle pour donner vie à l'exercice. Ainsi, on peut dire que les geiko sont une source infinie de création de situations d'entraînement en termes d'exercices à thèmes, où les élèves sont invités à se conformer à une forme, à réfléchir à sa pertinence, à essayer de la retrouver ou de la mettre en pratique. Répéter la situation ou la créer.

Si connaître une technique est une bonne chose, cela reste inutile si on ne se retrouve jamais en position de l'appliquer. Quiconque a fait un peu de randori a été face à ce problème que Kano a découvert et analysé progressivement en mûrissant dans sa pratique. L'homme qui l'a le plus clairement confronté aux limites de la "technique comme solution", qui avait fonctionné contre Fukushima Kenkichi, c'est le professeur de l'école Kito, Likubo Konen, quand il devient son élève en 1881 après quatre ans d'études de la Tenshin Shinyo ryu. Celui-ci, bien qu'âgé de plus de cinquante ans, ne laisse aucune occasion à son jeune élève d'appliquer les nombreuses techniques qu'il connaît pourtant parfaitement. C'est le genre de problème qui ne peut laisser Jigoro Kano indifférent, et dont seule la découverte et la formulation de la solution pourra l'apaiser intellectuellement... Cette seconde anecdote célèbre montre clairement l'évolution décisive qui se produit dans la conception de Kano, à ce moment-là: en 1885, soit trois ans après la fondation du Kodokan ! C'est lui qui projettera plusieurs fois nettement son professeur sans être lui-même projeté. À la suite de ce randori, le dernier qu'ils feront ensemble, Likubo remettra à Kano l'ensemble des documents de transmission de l'école. Comment Kano a-t-il pu surmonter l'obstacle que lui oppose le vieux maître de la Kito ? De deux façons. D'abord par l'analyse : il a remarqué deux choses. La première, c'est que, à la différence des autres écoles de jujutsu, l'art de la Kito ryu ne se concentre pas sur les techniques en elles-mêmes, mais sur la façon de les amener ... même si l'enseignement n'en dit rien. La seconde, qui est une prise de conscience personnelle, c'est que l'on ne peut porter une technique que si l'on est comparativement en meilleure posture que le partenaire. C'est ainsi qu'il va définir les trois étapes qui précèdent la technique kuzushi (le déséquilibre), tsukuri (la préparation), et le kake (le placement). Ensuite par la pratique : avant de finir par être si efficace sur la personne qui lui semble la plus à même de pointer les défauts de sa méthode, Jigoro Kano s'est exercé au quotidien avec ses élèves selon sa méthode et en isolant ces points. Kuzushi, littéralement "destruction". Il s'agit de détruire la posture du partenaire. Le kuzushi permet de fixer le partenaire "dans la position la plus inconfortable qui soit où il ne lui est possible ni de chuter ni de se redresser mais qui se situe entre les deux". C'est-à-dire qu'il est figé, qu'il a perdu sa capacité de mouvement. Jigoro Kano parle de six (avant, arrière, latéral droit et gauche sur l'avant comme sur l'arrière) ou huit directions (en rajoutant droite et gauche) princpales de déséquilibre, où huit peut aussi désigner une infinité de directions. En effet, il précise que peu importe la direction choisie, il s'agit dans tous les cas d'amener le partenaire sur la plus petite surface d'appui possible. Il peut être figé, fixé, physiquement (sur ses appuis) comme mentalement (sur une feinte ou une confusion). C'est pourquoi "déstabilisation" semble être la meilleure traduction de ce terme. Tsukuri, c'est après la phase de destruction, l'étape de la "construction", la traduction littérale. C'est là que l'on construit la situation de faiblesse du partenaire. En effet, l'avoir déstabilisé est important mais si l'on est soi-même en fâcheuse posture, non seulement on ne pourra pas profiter de la situation du partenaire mais, surtout on ne peut pas dire qu'il soit faible. La notion de faiblesse est relative et dépend de la situation de l'un par rapport à celle de l'autre. Construire la faiblesse est donc une double tâche. Il s'agit d'une part de, sinon accentuer, du moins maintenir la "déstabilisation" du partenaire et, d'autre part, de se positionner soit en posture forte, c'est-à-dire là où notre capacité de mouvement est préservée. Kuzushi, tsukuri et kake doivent avoir placé le partenaire dans une situation où (en nage waza) "bien qu'encore debout, il est dans une situation de mort en sursis". Vient ensuite le nage, qui n'est autre que le "placement", le moment où l'on applique la technique. C'est ce qui fait dire à Jigoro Kano : "Une technique doit se porter soit quand la posture du partenaire s'est affaiblie d'elle-même, soit lorsque je l'ai moi-même détruite". Ces étapes de kuzushi, tsukuri, kake ne s'appliquent bien sûr pas qu'au nage waza, mais aussi au katame waza. Dans le premier cas, la technique qui vient après le nage prolonge le mouvement tandis que dans le second, elle le fige.

http://hitoyume.over-blog.com/article-36756171.html

Kan-geiko et Shochu-geiko : les périodes exceptionnelles d’entraînements

Mise en place par Jigoro Kano, le kan-geiko et shochu-geiko font les deux périodes exceptionnelles d’entraînement du jùdô et représente le cycle semestriel mise en place par Jigoro Kano pour rythmer la vie du dôjô.

Kan-geiko (entraînement dans le froid) a été mis en place dés 1884. C’est une période d’entraînement durant laquelle les judokas s’entraînaient très tôt le matin (de 5h30 à 7h30) pendant 30 jours avec les portes et fenêtres grandes ouvertes. Cette période demande aux judokas de faire un effort car elle se déroule du 6 janvier au 4 février soit la période la plus froide de l’année. Ainsi les conditions d’entraînement dans ce froid sont très difficiles à suppoter. Elle commençe donc avant le Kagami biraki (le 11 janvier) pour se terminer un peu après. Cela permet symboliquement de marquer la continuité dans la pratique malgré la rupture puis la renaissance de quelque chose. On notera que de nos jours on s’entraîne durant 10 jours de 5h30 à 7h30 (du 6 janvier au 15 janvier).

Shochu-geiko (entraînement dans la chaleur) a été mis en place en juillet 1897. D’une période de 30 jours elle aussi, elle permet aux judokas de s’entraîner aux heures les plus chaudes de l’année et de la journée. Les entraînements ont lieu à partir du 15 juillet de 13 heures à 15 heures. Le climat au Japon à cette période est chaud et humide, ce qui rend les entraînements également difficile. On notera que de nos jours on s'entraîne durant 10 jours (du 13 au 22 juillet).

Pour Jigoro Kano, ces entraînements sont mis en place pour mettre leur force mental à l’épreuve car il demande de la persévérance, la constance et la continuité dans l’effort.afin de permet de mieux se connaître.