Définition de la F.F.J.D.A.

LE JÙDÔ,

ORIGINES ET CONCEPTS ORIGINES

Le jùdô tel qu'il est créé en 1882 par KANÔ JIGORÔ, est une méthode d'éducation intellectuelle, physique et morale. Inspiré des formes de combat traditionnelles, il comprend diverses techniques pour projeter, maintenir au sol ou forcer l'adversaire à abandonner.
Mais la caractéristique même du Jùdô est de prendre prétexte de la confrontation physique pour permettre à chacun d'affirmer sa personnalité et d'accéder à une meilleure maîtrise de soi tout en pratiquant des techniques susceptibles d'assurer sa protection.
En France, le Jùdô apparaît dans les années trente, mais il se développe surtout après la deuxième guerre mondiale, grâce aux actions de Moshe Feldenkrais, Kawaishi Mikinosuke et Paul Bonet-Maury, président fondateur de la Fédération Française de Jùdô en décembre 1946.
Lorsque le professeur Jigorô Kanô créa le JÙDÔ KÔDÔKAN, sont intention était de promouvoir un moyen d'éducation nouveau dont le principe était : "la meilleure utilisation de l'énergie physique et mentale".
Ce principe de portée générale englobe, en fait, toutes les activités humaines. Ainsi, "JÙDÔ", dans le sens le plus large du terme, est une étude, un procédé d'entraînement applicable à l'esprit et au corps aussi bien en ce qui concerne la direction de sa vie que de ses affaires.
D'autres moyens peuvent être utilisés pour cultiver ce principe, mais le Maître KANÔ précisait que s'il avait choisi le JÙDÔ, c'est parce qu'en procédant ainsi il pouvait en même temps rendre le corps de son élève sain, fort et utile.
Par le JÙDÔ, il pouvait les aider peu à peu à saisir le principe lui-même dans toute son importance. La force physique, mentale, spirituelle, "l'énergie" ne s'éveille que par l'effort. Il faut transpirer d'abord sur le tapis et ensuite, par un travail incessant, développer la compréhension, l'intelligence, la vie intérieure faisant de nous des êtres sociaux et humanistes.

CONCEPTS ET MÉTHODOLOGIE

Le jùdô est éducation.
L'enjeu du parcours qu'il propose : la découverte et l'affirmation de soi dans le respect d'autrui.
Une pratique juste est garante du développement et de la réussite de chacun.
Le rôle de guide du professeur est essentiel dans ce processus.
Orienter la pratique vers des buts de maîtrise permet au plus grand nombre de ce maintenir dans l'activité et de s'y épanouir.
La maîtrise des Habiletés techniques Fondamentales est un élément essentiel pour progresser sur le long terme.
Voilà quelques idées chères aux responsables de l'École Française de Jùdô-Jùjutsu qui s'organisent autour de la triple mission de cette École au service des enseignants de jùdô : analyser la discipline, transmettre les principes et les connaissances, incarner à travers ses formateurs une conception large et globale du jùdô.

Chaque enseignant de jùdô, individuellement, se trouve devoir faire face à un moment ou à un autre aux questions essentielles qui se posent à l'ensemble des acteurs responsables de notre discipline en prise directe avec un monde en permanente évolution. Quelle conception générale d'enseignement? Quel but donner à la pratique ? Quelles méthodologies appliquer ? Comment et quoi enseigner à de nouveaux publics ? Malgré la qualité de sa formation et la sincérité de son engagement, il peut se trouver parfois démuni et à la croisée de conceptions et d'intérêts divergents. L'École Française de Jùdô-Jùjutsu a été institué dans le but de servir l'enseignant de jùdô. Elle existe pour permettre à celui-ci de profiter des trois missions qui lui ont été confiées : réfléchir, transmettre, représenter. Réfléchir, c'est-à-dire analyser toujours plus précisément tous les éléments qui peuvent rendre pertinent un enseignement : les méthodologies d'apprentissage, les modes de fonctionnement mental et physique de chaque catégorie d'âge mais aussi, et plus largement, les éléments fondamentaux qui font le socle de notre discipline éducative, tant sur le plan technique que sur le plan des principes.
Transmettre, c'est-à-dire offrir le maximum de clarté et de connaissance aux professeurs de jùdô, par l'organisation de stages de perfectionnement réguliers (voir encadré) et par la publication d'ouvrages techniques et pédagogiques sur divers supports (voir encadré). Incarner, c'est-à-dire, faire vivre sur le tapis - lieu de rendez-vous essentiel - les techniques et les principes évoqués, par l'intermédiaire de formateurs aptes à représenter l'excellence de la pratique du jùdô dans leur forme de corps comme dans leur attitude.
À ces trois missions s'ajoute une quatrième, qui est la conséquence des précédentes : réunir à travers elle le plus grand nombre d'enseignants (et à travers eux les jùdôkas français) dans une vision commune et pertinente du jùdô.

Une conception globale.
Le jùdô enseigné dans les clubs doit garantir que chacun puisse s'exprimer dans sa maturité de jùdôka dans la perspective qui lui conviendra le mieux :
- Avoir la possibilité de pratiquer le jùdô de compétition à un haut niveau de pratique,
- pouvoir approfondir ses connaissances en jùjutsu, développer une pratique "auto-défense",
- s 'impliquer dans sa pratique comme un moyen d'approfondissement personnel, pour trouver des sensations justes d'équilibre physique, mental et relationnel,
- Le moment venu, avoir les moyens de s'orienter vers l'enseignement avec le potentiel technique, la compréhension des principes nécessaires
- et, d'une façon générale, pouvoir pratiquer pour le plaisir de pratiquer, dans une perspective de progrès, le plus longtemps possible, avec un minimum de risques physiques et un maximum de satisfaction.
Ajoutons que cet enseignement doit offrir à chacun la possibilité d'évoluer d'une perspective à l'autre ou d'en adopter plusieurs simultanément, de pouvoir mûrir et évoluer dans sa pratique en fonction de sa conscience et de son potentiel physique.
Cet objectif, apparemment multiforme, ne passe cependant pas par un cloisonnement des pratiques, mais par l'élaboration d'un socle commun, d'un niveau d'acquisition de base, sur le plan physique, technique et mental. Le rôle essentiel de l'enseignant, dans cette perspective, est d'offrir au pratiquant les moyens de progresser en maîtrise.
Quand l'objectif général de l'enseignement est effectivement placé dans l'amélioration de la maîtrise des élèves, toutes les voies sont ouvertes, y compris celle de la haute compétition, l'expérience ayant abondamment démontré que de jeunes combattants adroits et bons techniciens ont un potentiel largement supérieur pour faire une carrière de haut-niveau, tandis que des combattants moins bien pourvus dans ces aspects fondamentaux se heurtent rapidement à une limite difficilement surpassable, tant pour devenir des champions que pour poursuivre sur les tapis, par la suite, leur pratique de jùdôka.

Le jùdô, une activité de maîtrise.
Installer le pratiquant dans une logique de recherche de progrès dans sa maîtrise, c'est, sur le plan mental, lui suggérer la nécessité de respecter des règles de fonctionnement de base : respect du lieu de travail, respect de l'enseignant et de son enseignement, respect des partenaires de travail, obligation d'une attention soutenue, d'une concentration sur la pratique, d'une persévérance dans l'effort, d'une remise en question. Sur le plan physique et technique, c'est lui offrir les moyens de développer en premier lieu son habileté en terme de posture, d'équilibre, de maîtrise des déplacements, de perception, de relâchement musculaire, de précision gestuelle (puissance et vitesse venant ensuite, développées sur cette base générale d'adresse) et de lui faire acquérir les éléments techniques fondamentaux qui lui permettront d'élaborer progressivement un jùdô de plus en plus riche et varié, par étapes successives, d'objectifs techniques en objectifs techniques, dans un souci constant d'évolution.

Une méthodologie précise pour une pratique juste à travers ses parutions et ses interventions, l'École Française permet à l'enseignant d'adapter ses méthodes à son public, d'être pertinent pour chaque niveau d'âge auquel il est confronté. Pour un public adolescent et adulte cet objectif passe par la mise en place d'une méthodologie précise qui s'appuie sur quatre ensembles d'outils pédagogiques : les Habiletés Techniques Fondamentales et les Situations d'Étude, les Exercices à Thème, le Randori dit " souple ", le Shiai.

On compare souvent les Habiletés techniques Fondamentales et les Situations d'Étude, ces ensembles d'exercices conçus à partir de l'analyse des bases techniques (les postures, les déplacements, les différentes formes de tai-sabaki, etc.), à des gammes, comme en musique. Ces outils favorisent un parcours d'apprentissage (seicho) progressif et précis qui permet, en terme d'acquisition motrice et d'amélioration des qualités physiques (l'adresse, notamment pour ce qui concerne la coordination), de construire une base sur laquelle on pourra développer un jùdô équilibré et personnel, ressenti. C'est ce qui conditionne l'émergence d'une pratique juste.

Les Exercices à Thème sont un ensemble d'exercices variés à pratiquer à deux dans lequel uke suit une directive précise pour aider tori à améliorer un aspect de son jùdô. Ils permettent la perception et la répétition de déplacements et de gestes justes, mais aussi de rythmes et de sensations justes. Le champ couvert par les Exercices à Thème est large : il va de l'exercice "fermé", proche des exercices de répétitions que sont uchi-komi et nage-komi, à l'exercice "ouvert", où l'indication que doit suivre uke le laisse très libre.
La pratique des Exercices à Thème requiert qu'une base des Habiletés Techniques Fondamentales (posture, saisie, déplacements élémentaires, chute...) ait été acquise. Elle demande aussi que le jùdôka soit capable de se mettre sans réticence au service de son partenaire, sache se relâcher et se contrôler physiquement et mentalement. Amener ses élèves à ce niveau de pratique sans lequel aucune progression commune n'est possible - être de bons uke - doit être le premier souci de l'enseignant est une constante remise en question pour le pratiquant.
Le troisième outil est la pratique du randori "souple".
Pour le définir, il est sans doute plus facile d'évoquer ce qu' il n'est pas : une confrontation dans laquelle l'enjeu mental est de "ne pas perdre" avec une très forte opposition à la garde et dans lequel on s'efforcerait de dominer physiquement l'adversaire, d'étouffer toute tentative de sa part. Le randori souple est un jeu d'opposition n'excluant en aucun cas l'intensité et l'engagement, mais qui ne se joue pas (ou très peu) à la garde, ni dans l'assujettissement physique du partenaire. Il s'agit plutôt de le surprendre et de le vaincre par la maîtrise des déplacements, des esquives, des rythmes... Oser "prendre le risque" de laisser le partenaire plus libre dans le randori, le "défier" (amicalement) en adresse et en technique a de considérables avantages : le premier d'entre eux est l'efficacité pour former des jùdôkas de très bon niveau. Le randori n'est plus un bras-de-fer monotone il devient un espace d'élaboration et de progression particulièrement riche. Les déplacements sont plus nombreux et plus divers, les attaques peuvent être fréquentes, variées et subtiles, les esquives s'enchaînent, ce qui permet de développer considérablement le potentiel technique, l'adresse, la vitesse, et de trouver un relâchement musculaire sans lequel les mouvements sont contraints, sans précision ni puissance - à terme, le randori de pleine opposition ne se distingue du randori souple que dans l'engagement : il apparaît comme une permanente recherche de déséquilibres par confusions, enchaînements, changements de rythme dans un travail en déplacement constant plutôt que comme une confrontation statique, bloquée par l'opposition des forces musculaires et des corps en contraction.

En plus de l'efficacité à moyen terme, ce mode de travail offre d'autres avantages d'importance. Rendre les jeunes élèves aptes à pratiquer et à profiter du randori souple, c'est les amener à prendre conscience et à mûrir en eux, par la pratique, certains fondamentaux du jùdô comme de l'existence : la présence positive de l'autre, son utilité, la nécessité de l'entraide, la puissance et la valeur des liens affectifs qu'il est possible de tisser avec ses partenaires. Le randori souple devient le moyen principal de développer sa maîtrise. De progrès en progrès, quel que soit son niveau, il est alors le vecteur de tout ce qui peut garantir une pratique prolongée, soutenue et de qualité : l'émulation et l'engagement, l'échange, la réussite, le plaisir. Ce climat de motivation conditionne les progrès du plus grand nombre et maintient dans l'activité une population qui s'en serait détournée. En outre, la possibilité de progrès étendus et prolongés longtemps après l'âge de l' apogée physique, offrent à une population adulte de pratiquer sans lassitude, avec enthousiasme et plaisir. Différents niveaux d'âge et de maîtrise peuvent ainsi pratiquer ensemble sans risque traumatique, chacun pouvant apprendre des autres, approfondissant sa conception et sa maîtrise du jùdô sur un mode plus proche de la notion de rencontre et d' émulation positive que d'exclusion, de fermeture sur soi et d'irrespect.

Le dernier outil de la méthodologie de l'École Française de Jùdô-Jùjutsu est le shiai. Indépendamment du choix d'un engagement dans la compétition de haut-niveau, la pratique du combat arbitré dont l'enjeu est la " victoire " selon des règles précises, est une expérience indispensable à la progression de tous les jùdôkas. Dans la recherche d'efficacité technique dans laquelle est engagé le pratiquant, elle est la garantie de sa confrontation avec le " réel «, représenté par l'extérieur, le partenaire-adversaire inconnu. Dans son exigence, elle est aussi la seule façon d'aborder certains aspects fondamentaux du combat, qu'ils soient physiques ou mentaux, techniques ou tactiques. Elle est un des vecteurs essentiels de la maturation globale du pratiquant. La compétition n'est pas une expérience indépendante de la pratique offerte dans les clubs ni n'en est l'aboutissement. Elle est l'un des outils essentiels de progression et le meilleur test d'efficacité.