Réflexion des Rouges et Blancs de Midi Pyrénées

Ces réflexions sont centrées sur l'esprit sportif qu'a mis en avant Jigorô Kanô dans sa doctrine "entraide et la prospérité mutuelle (jitai kyoei)" à partir de laquelle Bernard Midan créa, en France, en 1985, le code moral du jùdôka. Cette esprit sportif est aujourd'hui, en théorie, partagé par l'ensemble des sports. Le jùdô a ceci de particulier qu'il en était un des précurseurs (1882) et qu'il l'a toujours particulièrement cultivé. Le jùdô est donc aujourd'hui l'un des portes parole légitime et privilégié de l'esprit sportif.
Inconnu

DE L’ÉTHIQUE ET DE LA CULTURE DU JÙDÔ

L’éthique ou morale du Jùdô a été petit à petit dévoyée par certains enseignants de clubs ainsi que par certains dirigeants, pleins de bonne volonté, mais, qui en appliquant à notre discipline des concepts propres à d’autres activités, ont appauvri le Jùdô.

Pour remettre les idées à leur place la F.F.J.D.A. a proposé le « CODE MORAL » et dans sa vulgarisation a essentiellement ciblé les enfants.

Si aujourd’hui nous constatons un grand intérêt des parents, c’est à cette campagne que nous le devons ainsi qu’à la qualité de nos enseignants.
Cependant nous notons que dans bien des cas le comportement de nos pratiquants, voire de nos responsables de clubs n’est pas ce que nous serions en droit d’attendre à partir d’une stricte observance de nos préceptes. D’où cela peut-il venir ?

Au départ Jigorô Kanô a proposé le Jùdô comme moyen d’éducation, sans pour autant rejeter l’idée de la confrontation. Il s’agissait essentiellement, pour lui, de passer par une pratique physique pour aboutir à une amélioration du comportement de l’individu. Ce concept bouddhiste veut que le corps et l’esprit ne faisant qu’un il ne soit pas possible d’améliorer l’un sans solliciter l’autre. Son souci résidait dans le fait de sauvegarder la culture japonaise au moment où ses îles s’ouvraient au monde occidental.

C’est toujours le même processus de pensée qui le conduit à vouloir agir sur l’ensemble des japonais en agissant sur l’individu : « un est en tout et tout est en un ». À partir de cette même notion nous trouvons les trois composantes du grade.

Là où nous rencontrons un écueil c’est précisément parce que trop de gestionnaires ne voient dans le Jùdô qu’un sport. Ils font également un grave contre sens entre la notion de « combativité » et celle « d’agressivité ».

La combativité correspond au « shin », c’est sur soi-même que se livre un combat en recherchant ‘le mieux faire’, sans compter sa peine : la combativité consiste à se vaincre soi-même, « l’agressivité » à dominer l’autre.

Pour pratiquer le Jùdô la combativité est nécessaire, l’agressivité est à proscrire sauf dans le temps du championnat et jusqu’au «sore made».

Après avoir acquis un éventail technique suffisant et une bonne condition physique, on pourra développer la combativité nécessaire dans le championnat. Dans la mesure où la technique et le physique seront satisfaisants, l’autre ne sera pas en danger.

L’erreur commise réside dans le fait que trop souvent l’élève est placé dans une situation inversée et trop tôt on développera son ‘agressivité’ sans jamais lui faire comprendre que son premier adversaire c’est lui. La défaite sera alors toujours due à l’arbitre, au tirage au sort, aux organisateurs qui ont fait une réunion trop longue, à la météo ….ou au Gouvernement !

« Seul le résultat compte, peu importe les moyens d’y parvenir ». La Fédération a beau déconseiller la pratique sportive prématurée, elle peut toujours vouloir lutter contre la « championnite », c’est au niveau des clubs que nous devons faire changer la façon de voir et de faire.

Pourquoi avec les premiers champions n’y a-t-il jamais eu de difficulté du comportement ? peut-être parce qu’ils étaient presque adultes à leurs débuts, parce que le champion n’identifiait pas sa valeur au seul résultat mais au sentiment d’avoir fait le mieux possible.

COMMENT POUVONS-NOUS FAIRE ÉVOLUER LES CHOSES DANS LE BON SENS ? en agissant sur les décideurs que sont les adultes, les dirigeants, les professeurs, les parents. Nous ne devons pas nous dresser contre le championnat mais nous devons y apporter des aménagements en fonction des âges, des niveaux, des conditions de pratique, de l’image qu’il doit véhiculer. Dans la mesure où nous aurons répondu à ces questions nous pourrons effectivement « participer à une meilleure compréhension de l’éthique et de la culture du Jùdô. »

Si ces constats sont les nôtres, nous voyons que notre priorité consiste à donner une autre image de la pratique du Jùdô : à l’entraînement le but devient une recherche d’amélioration du physique et de la technique, une exigence de l’individu sur lui-même pour faire mieux et plus beau, grâce à la coopération avec l’autre. Nous sommes dans ‘l’entraide et la prospérité mutuelles’ !

Chacun doit participer à la construction de l’édifice, il n’y a pas un seul actif. Tori ne peut progresser qu’à partir de ce que propose Uke dans ses déplacements et la consistance de son corps. Initialement c’est à Uke de faire en sorte que Tori ressente le tsukuri et le kuzushi. Chez le débutant Tori ne peut le réaliser parce qu’il ne peut le ressentir. Cette façon de faire enrichira les deux pour plusieurs raisons et illustrera la notion de ‘minimum d’effort pour le maximum d’efficacité’ :

- c’est ensemble qu’ils vont découvrir
- Uke en faisant ressentir ces mises en déséquilibre à Tori saura les éviter dans le temps de l’opposition.
- Grâce à ce travail de Uke Tori ne pourra pas mal faire. Progressivement c’est lui qui placera Uke dans le bon déséquilibre .
- Armé de la sorte Uke bâtira sa défense plus tard, il anticipera, évitera, esquivera, et c’est alors que Tori enchaînera plutôt que de faire uniquement des attaques directes.
- Le Jùdô deviendra alors une « conversation motrice » entre eux

Cette démarche pédagogique conduit également à donner à l’enseignement une co-notation comportementale de l’individu par rapport au groupe. La connivence qui préside à l’acquisition conduit réciproquement à la prise de conscience de l’importance d’autrui, son respect, la découverte de la richesse des différences. Faire le Jùdô revient à apprendre à lire l’autre. Le lire c’est le considérer tel qu’il est et apprendre à bâtir avec lui. C’est la tolérance matérialisée comme échafaudage de toute vie en société et générée par l’amitié.

Nous sommes alors dans le droit fil de la pensée de Maître JIGORÔ KANÔ en utilisant le Jùdô en tant que ciment social. Or il est beaucoup plus riche. En bons élèves nous avons pris son enseignement et le faisons fructifier en y ajoutant un plus.

Pour lui oriental l’individu n’a de raison d’être qu’en tant qu’élément constitutif d’un tout. Nous acceptons cette conception mais nous gardons à l’individu son importance en tant que tel. C’est par le canal du championnat que nous cherchons à forger l’individu pour son épanouissement propre. Comment ? progressivement et sans brûler les étapes.

Nous préconisons une période d’apprentissage pendant laquelle le Jùdô se crée « avec l’autre ». Rester à cette pratique du Jùdô serait une grave erreur : le Jùdô est l’expression d’une réalité et non d’un simulacre. En tant que sport de combat il implique la pratique « contre l’autre ». À ce stade deux objectifs :

- quantifier les progrès réalisés
- se situer par rapport aux autres

Quantifier les progrès. Utiliser la lecture de l’autre pour tenter de le surprendre, le jeu du plus malin, du plus prompt à réagir à une situation donnée. C’est la mise en évidence d’une connaissance technique et de l’utilisation d’une valeur physique. C’est le jeu de l’attaque et de la prise d’initiative. C’est l’occasion d’oser tenter pour constater de son efficacité et donc de prendre des risques en acceptant l’échec, la chute. L’objectif est de tenter de faire chuter et non de chercher à ne pas chuter. C’est le temps où l’on « essaye » ses techniques pour en faire des armes de combat pour demain. C’est le RANDORI qui d’un point de vue comportemental forge des citoyens déterminés et sachant se risquer à prendre des responsabilités.

Se situer par rapport aux autres. Avoir passé du temps à apprendre des techniques, avoir accepté des revers mais aussi constaté des progrès serait stérile si à un moment donné le pratiquant ne cherchait pas à savoir où il se situe par rapport aux autres, quelle est son efficacité. La minute de vérité éclate lors du championnat. Là encore les valeurs physiques et techniques seront déterminantes mais la valeur tactique prendra une grande importance. Il ne sera plus question de ‘risquer’ des techniques mais de maîtriser ses armes de combat fourbies lors des randori. Il faudra imposer son jùdô et vouloir intensément la victoire en utilisant tout son vécu. L’enrichissement de l’individu viendra de certitudes, il ne sera pas question de ‘s’imaginer’ très fort, le verdict du championnat est sans appel. Il ne sera pas question non plus de se lamenter si l’échec est trop cuisant, le Jùdô ne se résume pas à un titre. Être champion n’est qu’être le meilleur un jour donné, le rester quelques temps est le propre de rares individus. Se convaincre de ça ouvre une large place à chacun dans une mesure : mettre tout dans la bataille et ne pas se laisser dominer par des appréhensions dues à l’imagination. Pratiquer le Jùdô doit conduire à constater ce qui est et non à se réfugier dans des craintes non avérées. Telle est la richesse offerte par la pratique du championnat d’un point de vue comportemental. Le rôle du professeur est de faire comprendre cette réalité. Elle implique un paramètre : aller au championnat-vérité se prépare, chacun dispose d’un capital de qualités et personne n’a le droit de n’en n’utiliser qu’une portion. En suivant cette règle il ne peut y avoir de désillusion en cas d’échec.

LE RANDORI

Il n’y a qu’une forme de RANDORI
Ce qui n’est pas Randori est : shiaï ou yaku soku geïko ou kagari geîko
Les notions de randori souple ou de randori compétition n’existent pas !

La finalité du Randori consiste à cultiver ses réactions psychologiques à partir d’acquisitions motrices :
- constater ses progrès
- apprendre à lire l’autre
- apprendre à surmonter ses craintes devant les incertitudes de l’inconnu
- devenir responsable de ses actes
- apprendre à juger une situation
- être capable de s’analyser après une action afin de déterminer la suite des contenus d’entraînement.
- affiner ses techniques et en augmenter le capital afin de s’adapter au plus grand nombre de situations/problèmes. La ‘voie de la souplesse’ évoquée par Jigorô Kanô pourrait bien être la capacité d’adaptation à ces situations
- développer l’esprit de combat, le shin ou recherche du mieux faire, du faire plus

Ces objectifs impliquent des règles :
- n’utiliser que sa valeur physique et ses connaissances techniques, la tactique n’a pas sa place, elle ne doit intervenir que dans le shiaï. Sauf si elle devient un thème de recherche, au même titre que la défense ou le contre
- l’attaque est construite à partir de l’observation de l’autre
- c’est le moment où l’on tente, où l’on doit essayer, où l’on doit prendre des risques,
- c’est l’occasion de tenter les techniques que l’on domine le moins afin de les intégrer
- les actions sont donc très diversifiées et c’est toujours l’attaque qui prime, la défense ne devant être recherchée que par l’esquive et le surpassement
- c’est également le moment de perfectionner ses receptions de chutes et de travailler la « fausse chute », les liaisons debout/sol
- tenter et risquer présuppose qu’il puisse ne pas y avoir succès. Lorsqu’on est sûr de son mouvement (tokui waza) il n’y a plus de risque.
- ce comportement serait stérile si, après, il n’y avait pas l’analyse professeur/élève.
- c’est le moment où l’on cherche son kumi kata d’attaque, donc toute attaque doit être précédée par une préparation ; c’est le jeu d’attaque à partir duquel se construisent les armes du championnat
- faire Randori ne consiste pas à dominer l’autre mais à se dominer soi-même
- il doit être envisagé comme « conversation motrice » entre les deux partenaires, donc les deux sont actifs

En corollaire : le contre par renversement, inhibiteur de l’attaque, n’a pas sa place sauf s’il est précédé d’esquive et / ou surpassement et ne comporte pas la chute de celui qui contre ; plus qu’un contre il devient une forme d’attaque par anticipation ou encore de préparation d’attaque par « piège tendu au partenaire ». c’est le seul moyen pour que cette action devienne positive car elle implique une souplesse des bras, antennes des réactions de l’autre et non plus instrument de défense, négative pour les deux ; le contre n’a sa place en Randori qu’en tant que ‘remise d’attaque’.
Sentir le Randori consiste à vouloir faire chuter et non à éviter la chute, à chercher le ippon et la maîtrise du geste vrai.

Actuellement la Fédération marque un intérêt prononcé pour l’enseignement du Jùdô aux adultes. Un petit groupe de Haut Gradés de la Ligue s’est senti très concerné par le sujet et a effectué un certain travail dont vous trouverez une suite de ‘volets’ traitant de cette pédagogie, dans la rubrique des Rouges et Blancs.

VOLET – I-

CARACTÉRISTIQUES DU JÙDÔ ADULTE

A / Les différentes catégories d’adultes
1- ceux qui n’ont jamais pratiqué
2 - ceux qui ont déjà pratiqué et qui reviennent après avoir interrompu -
3 - ceux qui n’ont jamais cessé
4 - le cas des retraités et du 3e âge

B/ Les points commun
- tous ont un métier et ne peuvent courir le risque de se blesser
- tous peuvent apporter au Jùdô en tant que gestionnaires
- chaque groupe a des caractéristiques propres
- dans chaque groupe se trouvent des féminines et des hommes
I- Ce qui les caractérise psychologiquement et morphologiquement
II- Comment organiser les séances en répondant à tous les groupes
III- Les points constants à éviter : psychologiquement et morphologiquement

C/ Les contenus constants de leur graduation.
- ils ont terminé leur croissance et les techniques étudiées doivent être en adéquation avec leur morphologie
- dés l’abord les techniques d’abandon doivent conduire à des progrès en NE WAZA
- ils doivent pratiquer le Jùdô et la self défense en parallèle
- arbitrage, connaissance de la loi de 1901, des statuts fédéraux et de la comptabilité d’association doivent faire partie de leur formation de sorte que 1er Dan ils soient opérationnels

CONSTANTES LIÉES À L’ÂGE

- EXPLIQUER AVANT DE FAIRE PRATIQUER
- NE PAS LAISSER UTILISER LA FORCE PHYSIQUE
- VARIER LES PARTENAIRES PLUS QU’À TOUT ÂGE
- ÊTRE TRÈS EXIGEANT SUR LES ATTITUDES
- ÊTRE CONSCIENT QU’IL EST PLUS QU’AVEC TOUT AUTRE IMPENSSABLE DE RISQUER L’ACCIDENT
- REVENIR À TOUT PROPOS SUR LA FINALITÉ DU JÙDÔ RECHERCHÉE PAR SON FONDATEUR ET INSISTER SUR LE FAIT QU’IL NE S’AGIT PAS SEULEMENT D’UNE HABILETÉ MOTRICE


VOLET II

EXERCICES D’ÉCHAUFFEMENT

EXPLIQUER : les adultes refusent de tenter quoi que ce soit sans connaître le pourquoi. Qu’il s’agisse des exercices d’échauffement ou des acquisitions techniques il est indispensable de faire appel à des raisons mécaniques qui conduisent à tel ou tel mouvement. « les enfants obéissent, les adultes coopèrent ».

Les premiers EXERCICES : d’emblée ils savent que le Jùdô se fait à deux et il est donc indispensable de les placer en couple. Dans les exercices d’échauffement l’un fait réaliser à l’autre soit en servant d’appui, soit en guidant le geste. Faire réaliser à l’autre c’est déjà apprendre. Certains exercices sont à privilégier : En première urgence la mobilité vertébrale. Soit les adultes sont incultes sur les sensations de leur rachis et semblent n’avoir qu’une vertèbre, soit une « paresse » vertébrale s’est installée, due en grande partie à la position assis.
A/ Mobilité vertébrale, du plus simple au plus complexe.
- enroulements et déroulements vertébraux à genoux. assis les bras tendus mains au sol devant les genoux. Poignets au contact des gx donc dos oblique en avant
- même position et le dos plat projection conduite des bras dans le prolongement du dos sans relever le tronc
- idem et revenir mains à la nuque puis repousser les bras en avant et revenir au dos arrondi
- même travail mais en tenant la ceinture à deux mains, la ramener derrière la nuque et revenir à l’enroulement après extension
- même travail mais parti debout les mains au départ sur les genoux jambes fléchies
- même travail mais sans appui des mains sur les genoux
- à partir de la position à plat dos, jambes fléchies pieds à plat, enrouler et dérouler la colonne en s’asseyant puis en se couchant, sans soulever les pieds
- même position de départ, tête au sol, remonter les genoux vers le visage sans soulever la tête
- travail spécifique de la nuque et du cou par mobilisation conduite dans le sens anatomique de flexion, extension, rotation, ante-pulsion et retro-pulsion en proscrivant la circumduction.
Pour tous ces exercices le rôle du partenaire est assez essentiel
B/ Renforcement abdominal toujours du plus simple au plus complexe.
Le souci majeur consiste à inhiber le rôle du psoas iliaque, moteur du tronc sur les cuisses et inversement entre 0° et 45° cuisses sur tronc. Une autre règle : il ne peut y avoir travail isotonique sans déplacement des points d’insertion les uns par rapport aux autres, donc les pédalages et autres ciseaux de jambe font travailler les cuisses mais pas les abdominaux sauf en isométrie relative avec sollicitation fréquente des charnières dorso-lombaire et lombo-sacrée. . Deux grandes familles l’isométrie et l’isotonie.
- isotonie : (même résistance) couché à plat dos jambes fléchies pieds à plat (le psoas iliaque ne peut travailler les cuisses à 45° du tronc) : Dans un premier temps avec contrôle des pieds par le partenaire afin d’aider par la sollicitation du quadriceps. A abandonner le plus tôt possible !
- 1/ mains à la nuque s’asseoir et se coucher
- 2/ bras croisés sur la poitrine même travail
- 3/ mains aux hanches idem
- les trois mêmes mais avec une très faible amplitude et très vite
- même position initiale mais menton poitrine élévation des jambes fléchies talons fesses, pour ramener les genoux au visage, donc le bassin bien soulevé.
- Jambes allongées, tête soulevée et bras latéraux au sol effectuer un arc de cercle au ras du sol pour ramener alternativement les genoux fléchis toujours talons fesses vers la main droite puis la gauche, combinaison de flexion-rotation.
- couché à plat ventre direction du regard fixe, soulever les deux jambes réunies tendues et sans qu’elles touchent le sol décrire un cercle complet en allant vers la gauche en avant vers la droite et revenir à plat ventre ; à chaque passage changer de sens
- a deux l’un sur le dos jambes fléchies toujours, l’autre à genoux assis sur les talons derrière sa tête ; celui qui est couché a la tête sur les genoux serrés du camarade qui lui tient les deux aisselles . Celui qui est couché remonte les genoux et les écarte pour descendre jusqu’aux coudes de son porteur, donc en soulevant le bassin
- toujours un couché l’autre à genoux devant les pieds, celui qui est couché repose ses pieds sur les épaules de l’autre et vient s’asseoir sans que le porteur tienne les jambes de celui qui s’assoit
- tous ces exercices se font par séries et dans l’année on augmente le nombre de répétitions et de séries
- un des plus difficiles se fait l’un debout jambes écartées mains au dos, l’autre est face à lui et a passé ses jambes autour de la taille du porteur, il monte et descend le tronc (au début le porteur peut tenir la ceinture)
- isométrie : (même distance entre les points d’insertion) couché à plat dos, bras croisés menton poitrine, jambes tendues réunies soulever les jambes et le tronc à environ 15° du sol et maintenir par séquences de 30’’. Le temps de contraction est égal au temps de relâchement
- à deux l’un assis jambes fléchies soulevées du sol bras croisés l’autre à genoux à côté, celui qui est assis reste en équilibre fessier et refuse de poser les pieds ou le tronc au sol, l’autre par petites pressions alternatives sur le front ou les genoux cherche à le déplier
- C/ Renforcement du train porteur.
- quadriceps par simples flexions, tronc droit (ce qui le facilite consiste à travailler par 2, dos à dos en gardant le contact des épaules et des hanches) sans jamais aller au delà de 90° jambe cuisse pour éviter la frictions des ménisques
- soit les pieds parallèles à écartement des hanches mais jamais les pieds ouverts
- soit même écart mais les pointes de pieds rentrées (position de seoie)
- soit les jambes très ouvertes pointes des pieds dans l’aplomb des cuisses pour solliciter les adducteurs
- par deux sautillements avec appui de l’autre sur les épaules
- bondissements au-dessus du partenaire à plat ventre puis à quatre pattes
- triceps sural en bordure de tapis pieds sur le tapis talons dans le vide monter et descendre
- marche en canard mais pas plus fléchi que 90° jambe/cuisse
- ÉVITER PAR DESSUS TOUT LES CERCLES AVEC LES GENOUX JAMBES SEMI-FLÉCHIES !
- D / Ceinture scapulaire
- à genoux assis placer les mains le plus loin possible en restant assis puis sans bouger les mains, bras tendus ramener les épaules et la tête oblique en avant des mains descendre le menton et la ceinture au contact du sol et remonter
- depuis la même position de départ fléchir les coudes pour passer le menton au ras du sol entre les mains, poursuivre à l’extension complète des bras puis fléchir les bras pour réaliser le même travail en ‘marche arrière’
les flexions extension (pompes) ne doivent pas être effectuées jambes tendues et réunies mais une tendue l’autre fléchie les genoux soulevés du sol . Ce pour éviter une surcharge lombaire
Ces quelques exercices ne peuvent pas être traumatisants pour des adultes et sont aussi bien réalisables par des féminines que par des hommes. Ils permettent de varier au cours des séances et ne sont certainement pas exhaustifs.

LA CULTURE

La définition que donne l'UNESCO de la culture est la suivante :
« La culture, dans son sens le plus large, est considérée comme l'ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l'être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances. »
Il ne fait pas de doute que l’on puisse parler de « Culture » Jùdô dés que l’on est conduit à fréquenter des Jùdôka de nationalité, religion, couches sociales différentes : tous répondent aux mêmes signaux de la même façon ! Afin de mieux comprendre comment il peut en être ainsi il est logique de remonter à la source du Jùdô et de se familiariser avec le Japon : son berceau. Si JIGORO KANO a imaginé le Jùdô et lui a donné une orientation précise c’est du fait de ses racines. Comme tous les hommes, il est le maillon d’une chaîne forgée par les influences de ce qu’ont vécu ses prédécesseurs. Il est le fruit d’une culture façonnée par un climat, des traditions induites par des croyances, et des siècles d’adaptations diverses pour permettre à une société de naître, croître et évoluer dans une région donnée. Qu’est le Japon ?

LE JAPON BERCEAU DU JÙDÔ
LA NAISSANCE

Le Japon doit son nom à deux idéogrammes chinois utilisés par les marins. Ils signifient « îles orientales » et contractés deviennent ZIPPON. Ils sont devenus NIPPON « terre du soleil levant » dans la langue japonaise.

Au large de la côte orientale de l’Asie se trouve un chapelet d’îles en arc de cercle dont la superficie est supérieure à celle de la Grande Bretagne et inférieure à celle de la France. Quatre îles principales : Kyushu, Shikoku, Honshu et Hokkaïdo faites de contrastes : des sommets escarpés, des plaines fertiles sur le passage des ouragans, les côtes sont battues tous les ans par les typhons, secouées par les séismes.

Ces contrastes de la nature ont façonné l’homme et légendes et histoire sont toujours entremêlées ! Où est la frontière ? Y en a-t-il une ? Les îles du Japon seraient nées de l’amusement de dieux qui ont trempé leur lance dans la mer et pour la sécher l’ont secouée : chaque goutte a fait naître une des trois cents îles de l’archipel, à ce que l’on dit !

La géographie a façonné la culture japonaise . Un détroit de 150 km sépare ses îles de la côte chinoise et la traversée a toujours été très périlleuse ce qui a correspondu longtemps à un isolement du Japon. D’un point de vue ethnique les origines du peuple japonais nous sont inconnues à ce jour, une seule certitude : il s’agit d’asiatiques. À l’âge de pierre une tribu, les Ainu vivaient au Japon d’aujourd’hui, de race blanche, très velus, ils seraient d’origine caucasienne ! Les typhons ouragans et autres séismes les ont conduits à voir des dieux dans ces manifestations de la nature. L’homme très mal adapté à ces rigueurs a été conduit à respecter cette nature et à devoir se consacrer uniquement à l’agriculture et à la pêche. L’habitat est resté très longtemps uniquement bâti en bois et la notion de ville a mis de nombreux siècles a être conçue. Le territoire était alors divisé en de multiples petits états dirigés par des sorcières ou magiciennes . Cette ancienne coutume du pouvoir régi par les femmes a subsisté jusqu’au VIIIe siècle et ce n’est qu’à partir du XVe siècle que le pouvoir est passé exclusivement aux mains des hommes.

En 250 après J.C. des guerriers mongols débarquent et s’imposent. Farouches combattants ils possédent des armures, des armes en fer très perfectionnées et sont à cheval . Ils apportent la connaissance de la culture du riz, le tissage et l’art de forger le fer. Ce sont eux qui structurent le Japon et constituent rapidement l’aristocratie. C’est d’une de leurs familles qu’est issu le premier Empereur, souche de tous ceux qui vont se succéder jusqu’à nos jours !

Une fois encore mythologie et histoire se confondent : le premier membre terrestre de la famille impériale est le petit fils de la déesse AMATERASU fille du soleil ! Envoyé du ciel, il porte les trois symboles : l’épée, le joyau recourbé et le miroir, attributs qui sont encore de nos jours ceux de la dignité impériale. L’épée ou katana lui est remise par la déesse qui l’a elle-même reçue de son frère. Celui-ci avait menti à sa sœur et pour se faire pardonner avait dû affronter un dragon, après l’avoir tué il avait trouvé ce katana dans le ventre du monstre. Le miroir venait également d’AMATERASU : mécontente du comportement des humains elle les avait privés de lumière et s’était cachée dans une grotte pendant de nombreux mois. Ne supportant plus l’obscurité, les autres dieux se réunirent et tramèrent une série de stratagèmes pour la déloger de sa caverne. Ils utilisèrent des coqs qui chantaient sans relâche, firent danser et chanter une jeune déesse et placèrent un miroir en bronze devant l’entrée de la grotte. Attirée par le bruit, Amaterasu finit par sortir et la lumière revint !. C’était au solstice d’hiver et depuis la fête du renouveau de la nature, le KAGAMI BIRAKI, commémore cet évènement. Nous en avons fait la Cérémonie des Vœux !

Toutes ces co-notations mythologiques font que l’Empereur a toujours été vénéré en tant que symbole religieux et non comme chef de gouvernement. Son rôle est d’intercéder auprès des dieux dans l’intérêt des humains, le vrai chef d’État étant une sorte de premier Ministre ! D’où les intrigues pour accéder à ce poste…

La famille des SOGA a su s’approprier ce rôle pendant plusieurs années. Malgré tout le Japon n’est qu’un assemblage de clans et ne connaît ni l’écriture (pratiquée en Chine depuis 3000 ans avant J.C) ni la poésie, ni la peinture.

Des moines bouddhistes chinois vont alors apporter ces connaissances et l’histoire du Pays du Soleil Levant va s’écrire d’une encre différente sur une nouvelle page !

L’ÂGE D’OR

Jusque là les japonais ont répondu à des croyances basées sur les dieux Montagne (yama), Typhon, Arbre, Rivière (kawa), etc . Tout s’appuie sur la déification de la nature, c’est la religion SHINTO. Avec les moines chinois l’influence bouddhiste pénètre le Japon. Les principes essentiels ne contredisent en rien ceux du Shintoïsme et sont acceptés : l’homme doit accepter le « dharma » c’est à dire l’ordre du Monde et pour ce faire il a des devoirs. En une seule vie il ne peut y parvenir, il va donc se réincarner. BOUDDHA, prince Indou au 6è siècle avant J.C. en avait donné la doctrine faite de méditation, privation et refus du plaisir.

Petit à petit celle-ci a été reprise par CONFUCIUS qui y a ajouté en règle absolue : les droits du faible et les devoirs du fort, le respect des supérieurs, le culte des ancêtres, et l’obligation pour les jeunes de suivre « la route tracée par les aînés ». Selon la qualité de la vie menée il devra vivre un nombre de vies plus ou moins grand pour parvenir à la félicité du nirvana et pourra se réincarner en humain, si rien de grave n’a été commis ; en animal et redevenir humain sera presque impossible, en végétal ou minéral et il n’aura aucune chance de parvenir au nirvana ! D’où le respect de la nature, des animaux et la perpétuelle recherche d’harmonie. Pour racheter une faute grave et un manquement à un engagement une seule possibilité : le suicide

On retrouve dans le roman de GENJI la description de ce que fut la vie au Japon jusque vers l’an 1200. Cette période a été marquée par le culte du beau, des arts, de la poésie et de la vie de Cour. Pendant toute cette période le Japon a vécu seulement sur lui-même et a poussé à l’infini ce que les chinois avaient apporté. Petit à petit les intrigues se nouent, des ministres ont soif de richesse et une nouvelle période va commencer !

L’AVÈNEMENT DES SAMOURAÏ

Qui dit intrigues dit luttes. Les nobles commencent par faire pratiquer les arts de la guerre à leurs fils en les mettant dans les mains « d’entraîneurs » plus ou moins spécialistes. Progressivement les faits d’arme prennent le pas sur les jeux floraux et on commence à parler de chevaliers en armure. Au milieu du XIIe siècle et pour environ 700 ans le guerrier devient le personnage et l’arbitre suprême, il impose sa loi au Japon, une loi militaire. Nous sommes en pleine féodalité et des alliances de seigneurs se créent pour unir des forces et des fortunes et satisfaire à des intérêts personnels. Ils s’organisent et donnent petit à petit à ces guerriers un rang et une éthique, un Code et la caste des SAMOURAI apparaît. Ce mot signifie « celui qui sert » . Il s’agit de servir son chef, son supérieur et d’appliquer les règles du BUSHIDO. Guerriers redoutables et redoutés ils sont de plus des lettrés de haut niveau maniant aussi bien la poésie, la musique et la peinture que les arts du combat. L’obéissance va au sacrifice suprême et plutôt que de se rendre, le suicide est la dernière issue vers la réincarnation en humain ! Les familles les plus importantes eurent rapidement leurs Samouraï et loin de s’entendre ils s’entretuèrent allègrement pendant plusieurs dizaines d’années. Petit à petit deux familles émergent puis une seule obtient l’hégémonie . Les évènements se calment et la guerre va venir de l’extérieur !!

KOUBILAÏ KHAN !

En 1268 le grand KHAN des mongols commence à s’intéresser au Japon . Quinze mille soldats s’embarquent de Corée pour envahir le Japon. Pour la première fois les Samouraï affrontaient des ennemis étrangers en formation militaire. Ils allaient affronter ceux qui n’avaient jamais perdu et qui étaient dotés d’arcs très puissants, de bombardes et autres explosifs. Heureusement les Mongols furent maintenus sur les plages et les marins Coréens décidèrent de rentrer par crainte du mauvais temps !. Le grand KHAN, furieux, veut parvenir à ses fins et prépare un nouveau débarquement. En Juin 1281 l’armada mongole revient et à la surprise générale les Samouraïs contre-attaquent avec de frêles embarcations très mobiles et incendient les bateaux des envahisseurs. Pendant plusieurs jours la bataille fait rage.

KAMIKASE LE SAUVEUR

Tout le Japon se mobilise et les vagues de soldats se succèdent avec un mépris complet de la mort. Ceux qui ne peuvent pas combattre prient dans les temples et soit, grâce aux dieux, soit à la météo, le typhon a le dernier mot. Toute la flotte mongole est détruite, ceux qui ne sont pas noyés sont décapités. Ce Typhon est le vent des dieux, le KAMIKASE (prononcer kamikazé) . Depuis les japonais croient que leurs terres sont protégées par les dieux.

Au XXe siècle ayant des avions plus lents que ceux des adversaires et peu de carburant ainsi qu’une pénurie d’explosifs, ils eurent recours aux avions suicide dont les pilotes, volontaires, étaient des demi dieux fiers de donner leur vie pour sauver l’Empereur ! Eux aussi ont été appelés KAMIKASE.

ET APRÈS ? ET ENSUITE !

Au cours des siècles suivants, luttes de pouvoir et guerres civiles se poursuivent. Il fallut attendre la période d’EDO (1616 - 1800) dite aussi des Tokugawa, pour voir le pays faire son unité et connaître stabilité et prospérité. Cependant les influences extérieures, accusées d’affaiblir l’esprit nippon, furent combattues par des lois restreignant le flux des hommes et des marchandises. Cette fermeture au Monde, ce repli sur soi, renforcèrent la conviction des Japonais - permanente dans toute leur histoire - d’être un peuple à part, promis à une destinée particulière. Ces deux siècles d’isolement virent pourtant un essor de l’art et de la littérature au Japon.

Le Japon serait sans doute resté hermétiquement fermé au reste du Monde si le cycle isolationnisme-ouverture ne s’était une nouvelle fois manifesté. En 1853, (sept ans avant la naissance de JIGORO KANO !) les États Unis décidèrent de recourir à la politique de la canonnière pour « ouvrir l’huître japonaise » et obtenir un accès commercial à l’archipel. Ils envoyèrent quatre bateaux de guerre dans la baie d’EDO (ancien nom de TOKYO) . La nation japonaise stupéfaite se vit ainsi sommée de mettre fin sans plus tarder à sa politique d’isolement. Gravement affaibli par les pressions extérieures et la crise interne, le SHOGUNAT (forme de gouvernement) finit par être renversé en 1867 et l’ordre des Samouraïs aboli !!

L’aptitude de ce pays au changement est stupéfiante, la continuité de sa culture ne l’est pas moins, quel que soit l’aspect par lequel on l’aborde. « Le fleuve coule irrésistiblement, mais son eau n’est jamais la même qu’ auparavant » . Le Japonais a l’art de puiser ailleurs la quinte-essence de ce qu’il découvre, il prend un temps pour le « digérer » puis il le fait sien en y apportant quelques aménagements. Il est commun de voir l’homme d’affaires vivre dans son bureau de façon très occidentalisée et de rentrer chez lui, enfiler son kimono, se recueillir devant l’autel des anciens et appliquer les préceptes que ses prédécesseurs ont toujours observés. Si nous tentions de les définir :
- de la religion SHINTO une règle absolue : la recherche de l’harmonie avec la nature étendue, extrapolée serait-on tenté de dire, à la vie en société
- du CONFUCIANISME le respect de l’ancien, du supérieur hiérarchique
- du BOUDDHISME la croyance en la réincarnation et à l’obligation, pour y parvenir, de ne chercher que faire le mieux en tout.
- de la survie dans le milieu rendu hostile par les outrances météorologiques, la prise de conscience que l’individu est désadapté devant la Nature et doit sa survie à son appartenance au groupe . « Un est en tout et tout est en un »

Ces concepts ont forgé tout au long des siècles les caractéristiques du peuple japonais. Avant tout ils considèrent essentiel tout ce qui les a précédés, ils ont un profond respect de leurs traditions qu’ils perçoivent comme les fondations sans lesquelles il est impossible de construire l’avenir. À ce propos les traditions sont envisagées de deux façons : soit elle sont les tremplins à partir desquels on innove en faisant évoluer sans renier. Soit elles sont le reflet de la culture et pérennisées en tant que telles (l’art du tir à l’arc, de la cérémonie du thé) Cette notion implique un respect sans faille pour les aînés, les plus haut gradés dans quelque hiérarchie que ce soit or tout est hiérarchisé. L’âge étant une hiérarchie naturelle ! Le terme de DAN est utilisé en tout : sur le plan universitaire, dans le monde artistique de l’arrangement floral ou IKEBANA, dans l’industrie et les titres d’ingénieurs etc. Une autre de leurs caractéristiques réside dans le sens de l’honneur ! Etre déshonoré interdit la réincarnation . Cette seule notion les pousse à rechercher toujours un engagement total dans la réalisation de la moindre entreprise ! Egalement une de leurs caractéristiques pourrait être la tolérance, l’acceptation de la différence. Certes les premiers prêtres catholiques ont été crucifiés puis de nombreux japonais se sont convertis et tout le monde vit en bonne intelligence sans jugement réciproque. Cette notion peut être le fruit de la conception bouddhiste qui veut que un soit en tout et tout en un. La résultante s’exprime par la recherche d’une vie de communauté et d’entraide devant un objectif à atteindre.

JIGORO KANO
FONDATEUR DU JÙDÔ
A/ KANO et le JÙJUTSU

Shinnosuke KANO, dit Jigoro KANO, est né le 10 décembre (28 octobre) 1860. Plutôt chétif, il ne pouvait admettre l’idée d’échec ! La réputation du jùjutsu reposant sur la possibilité donnée au plus petit de vaincre le plus grand, très jeune il s’adonne à cette discipline. Rapidement plusieurs questions se posent à son esprit, sans réponse de la part de ses maîtres. Tout en continuant à pratiquer, pour maîtriser les techniques, il cherche ses propres réponses et il parvient à s’ouvrir un chemin qui le conduit du « jutsu » (la dextérité) au « » la voie. C’est ainsi qu’il élabore ses théories du seiryoku zenyo et du jita kyöei, les deux piliers du Jùdô.

Afin d’éclairer ce cheminement laissons parler JIGORO KANO à partir des traductions tirées du livre « Essence du Jùdô »
« nombreux sont ceux qui sont familiarisés avec le terme jùjutsu, or il existe des écoles qui font des choses totalement différentes qu’elles appellent jùjutsu et d’autres qui font les mêmes choses qu’elles nomment différemment » Certaines ne travaillent que sur des projections d’autres sur du travail au sol, d’autres sur les coups ou les étranglements et luxations .

Au sujet des origines du jùjutsu rien de précis ! « Mon opinion personnelle est que le jùjutsu a été entièrement façonné par les japonais » Peut-être une influence chinoise importée par un moine mais sa connaissance se bornait aux coups de pieds et de poings issus du KEMPO .
Quoi qu’il en soit, au sens de JIGORO KANO la finalité du jùjutsu ; « de nombreux styles ont été développés avec chaque fois des modes d’application différents : projeter, frapper les points vitaux ou encore capturer : le but ultime étant de tuer ! » « bien que le combat semble avoir été au cœur de la pratique du jùjutsu, il s’y rattachait également d’autres finalités, comme l’éducation physique et l’entraînement mental …..bien qu’il ne soit pas sans imperfection lorsqu’il est considéré comme un tout, le Ju jutsu s’affirme comme un héritage culturel qui doit être préservé... j’ai atteint mon objectif après avoir approfondi ma connaissance du jùjutsu tel qu’il existait par le passé, conservant ce qui me semblait nécessaire de conserver et rejetant ce qui me semblait inévitable de rejeter, étudiant en profondeur les techniques et les théories pour les retranscrire sous une forme mieux adaptée à la société d’aujourd’hui. »

B/ du JÙJUTSU au JÙDÔ

« Il existe plusieurs raisons qui m’ont fait délaisser le terme jùjutsu pour lui préférer le nom Jùdô. La raison principale c’est que le ‘do’(la voie) est ce qui est mis en exergue dans ce qui est enseigné au Kodokan alors que jutsu ‘l’efficacité technique’ n’est qu’incident. »

À ce niveau nous devons réfléchir ! Il n’est pas anodin que JIGORO KANO ait voulu donner à sa « méthode » le sens de la voie au moment où le Japon s’ouvrait au Monde. Son propos était centré sur la nécessité de ne pas perdre les principes de vie qui avaient jusque là si bien réussi à guider le peuple japonais. Il crée alors une école dite « Jùdô Kodokan », le terme de Jùdô existant déjà mais ne représentant qu’une forme de Jujutsu sans organisation particulière.
En remplaçant le jutsu par le « Je voulais simplement m’assurer que les réalisations de ceux qui m’avaient précédé ne soient pas perdues. »

Les écoles de jùjutsu étaient très éloignées les unes des autres par leurs contenus et JIGORO KANO a eu le mérite de « conserver les points forts des écoles pour compléter les éléments qui leurs manquaient. Je finalisais les techniques en incorporant différents processus que j’avais moi-même mis au point. » - « Aujourd’hui en parlant jùjutsu l’on associe le plus souvent à une technique privilégiant des pratiques dangereuses….. nous pensons en priorité à quelque chose de douloureux pour le corps qui ne peut nous apporter aucun bénéfice. Le véritable jùjutsu n’a rien à voir avec cela. C’est particulièrement le cas du Jùdô KODOKAN que j’ai développé qui n’implique rien qui puisse se révéler dangereux. Je ne mettrai jamais assez l’accent sur le fait que ce que je préconise est loin d’être un sport violent ou dangereux. »
« L’organisation du Jùdô Kodokan est fondamentalement identique aujourd’hui à ce qu’elle était lorsque j’établis mon école mais à ce moment là, lorsque j’expliquais le Jùdô, je le divisais en trois parties : la méthode de combat (art martial), la méthode d’entraînement (éducation physique) et le processus de développement moral (incluant le développement intellectuel, l’acquisition du sens moral et l’application des principes du Jùdô à la vie de tous les jours). À la création de son école « j’utilisais une méthode qui mettait l’accent sur le randori. Cette méthode permettait d’assimiler naturellement les katas au travers de la pratique du randori. C’était un peu comme enseigner la rédaction sans avoir recours à un livre de grammaire, ou enseigner les bases de la grammaire tout en expliquant comment écrire un essai. » Le nombre d’élèves augmentant, les niveaux deviennent hétérogènes et JIGORO KANO doit différencier les temps de chacune des deux méthodes. Dans tous les cas il insiste surtout sur : « Il est nécessaire d’utiliser de manière plus efficace son énergie morale et physique pour atteindre un but précis. » D’où une des maximes essentielles sur lesquelles repose l’enseignement du Jùdô : « SEIRYOKU ZENYO – la recherche de l’efficacité maximum par l’utilisation optimale de son énergie » : « Toutes les techniques de Jùdô doivent être gouvernées par ce principe de base et elles doivent être étudiées et pratiquées de manière approfondie ! » Pour lui il devient très clair qu’en tout il faut avant tout se fixer un objectif et pour l’atteindre la maxime précédente est la seule voie. Il cherche donc à utiliser le Jùdô comme éducation physique et mentale. L’éducation physique n’a d’intérêt que dans la mesure où elle permet une optimisation de la potentialité physique mise au service du groupe dans lequel vit l’individu. La Culture physique axée sur le seul développement des masses musculaires ne présente pas un intérêt majeur ! Le Jùdô moyen d’éducation intellectuel : « le développement intellectuel peut être considéré de deux manières différentes : les personnes qui ont beaucoup de connaissances et les gens qui ont un jugement éclairé ne sont pas nécessairement les mêmes. … vous devez clarifier vos objectifs afin d’exercer votre énergie mentale et physique de la manière la plus efficace possible afin de les réaliser. Professeurs et élèves doivent avoir des projets clairs. Ce n’est qu’avec des objectifs clairement définis que le développement intellectuel pourra se prévaloir de résultats. »
« Une population pleine de vitalité est seule garante de la prospérité d’une nation, et cette vitalité dépend de l’entraînement moral et physique proposé aux gens. À l’époque féodale le japon basait son éducation sur la pratique des arts martiaux. Le modernisme de l’époque Meiji (1868) fit que cette éducation tombe en désuétude. Ceci est dû surtout à ce qu’alors les écoles étaient multiples et ne traitaient qu’une partie : le principal objectif était ignoré. La méthode était dépourvue de structure et s’avérait souvent dangereuse. Alors je mis toute mon énergie à réformer le Jùdô. En 1882 j’établis le Jùdô Kodokan pour proposer un enseignement scientifique moderne en accord avec mes principes. Par dessus tout, je renonçais à mettre uniquement l’accent sur l’entraînement au combat, qui avait été toujours au cœur des arts martiaux et je fis de l’entraînement mental et physique l’objectif fondamental du Jùdô. « Je n’ai jamais cessé de rappeler qu’il faut commencer par l’étude des waza avant de songer s’engager sur le chemin du du Jùdô. »
« Le seiryoku zenyo, le principe du Jùdô, peut être appliqué à tous les aspects de la vie sociale. Comment peut-il être appliqué au sein d’un groupe ? Il suffit qu’une personne agisse de manière égoïste pour que naissent les conflits. Par contre si chacun prend en compte les besoins et les situations particulières de chacun les conflits peuvent être évités ce qui favorise l’harmonie. Le conflit se fait au détriment de tous tandis que l’harmonie se fait au bénéfice de chacun. Ainsi lorsque des individus vivent en groupe ils peuvent s’entraider. Il est des choses qui ne peuvent se réaliser sans l’aide d’autrui c’est ce que j’appelle le ‘ JITA KYÖEI’ (entraide et prospérité mutuelles). »
De ces définitions du Jùdô écrites par JIGORO KANO nous pouvons retenir des principes essentiels :
- il place sur le même plan la valeur physique, mentale et morale
- le faisant il donne les moyens d’y parvenir en préconisant la concentration maximale dans la conduite d’une entreprise
- dans un premier temps il est évident de constater les progrès réalisés dans la pratique physique ce n’est qu’après que la réflexion permettra d’extrapoler à tous les actes de la vie et de « s’engager sur le chemin du du Jùdô. »
- il démontre la nécessité de prendre garde à l’autre afin d’améliorer ensemble le résultat à des efforts donnés
- le Jùdô nécessite la participation active et totale des deux dans l’étude des wazas
- il devient un vecteur essentiel de la tolérance et de l’altruisme
- il suggère la prise de conscience de ces valeurs par l’étude des wazas et leur extrapolation à la vie en société

Il est à noter que le Jùdô Kodokan a commencé à être enseigné en 1882 soit lorsque JIGORO KANO avait 21 ans seulement. Son choix de vie a été l’enseignement ! Sa vie a été marquée par la conviction que la cause la plus noble et le plaisir le plus grand résidaient dans l’épanouissement des jeunes qui mettront toute leur énergie à agir pour le bien de la société. Il a fait du Jùdô un modèle éducatif en étant convaincu que le sport n’avait pas de frontière. Membre du CIO il n’a eu de cesse que de voir le Japon organisateur de Jeux.
« Dans le futur, les citoyens du monde se mêleront progressivement. Quand le temps sera venu, si nous avons appris beaucoup des autres nations mais que nous n’avons rien à leur enseigner, non seulement nous devrons nous sentir honteux, mais il nous sera également difficile de ne pas nous voir méprisés. Aussi que pouvons nous leur enseigner ? Nous avons le Jùdô. »

S’il n’est pas démontré que le Jùdô a apporté la paix aux hommes, on peut constater quand même que l’œuvre de son fondateur s’est vulgarisée : en 1882 les premiers cours se font sur 12 tatamis (24 m² le tatami étant l’unité de surface). Aujourd’hui la Fédération Internationale compte 187 pays.

LA VIE DE JIGORO KANO EN QUELQUES DATES

1860 sa naissance / 1877 il entre à l’université et 1878 il fonde le 1er club de base ball au Japon. / 1879 il étudie le jùjutsu chez Maître ISO / 1881 licencié es-lettres, 1882 diplômé en sciences Esthétiques et Morales, il fonde le Jùdô Kodokan pour 9 élèves (ils seront 600 en 1889 !) / 1884 attaché à la Maison Impériale et en 1886 reçoit le 6e rang promu vice président au Collège des Nobles. / 188 Recteur au Collège des Nobles et de 189 à 1891 représente le Japon en Europe. / 1893 nommé Directeur de l’École Normale Supérieure et reçoit le 5e rang Impérial / 1909 il est le 1er Japonais membre du CIO / 1916 reçoit le 3è rang Impérial crée la revue Kodokan . / 1922 siège à la Chambre Haute / 1928 participe à l’Assemblée Générale des Jeux Olympiques et assiste aux Jeux de 1932 aux USA ainsi qu’à ceux de Berlin en 1936 / Il obtient que les Jeux de 1940 aient lieu au Japon mais la déclaration de la guerre les annule. Il meurt en 1938 sur le bateau qui le ramène du Caire et reçoit le 2e rang Impérial à titre posthume.

Il semblait essentiel de reprendre succinctement les étapes traversées par le fondateur du Jùdô mais notre propos ne consiste pas à retracer l’histoire du Jùdô tant au Japon qu’en France. Des ouvrages de vulgarisation et des textes sur Internet existent à ce sujet, tous parfaitement documentés.

LE PROFESSEUR TRANSMETTEUR DE LA CULTURE

Laissons donc l’histoire aux historiens et analysons les messages que nous avons reçus afin de voir s’il nous est possible de les actualiser à notre époque et dans notre civilisation.

Celui qui vient au Jùdô ne voit qu’un sport, le rôle du Professeur consistera à lui faire découvrir ce que l’on peut nommer la « Culture Jùdô », à savoir une connaissance de toutes les facettes de l’activité conduisant à un comportement typique !

Très progressivement, à la faveur de discussions informelles (ou MONDO : littéralement ‘question-réponse’) et avec un vocabulaire adapté aux âges de son auditoire, il devra s’inspirer des préceptes de JIGORO KANO qui préconise appuyer l’enseignement sur deux formes complémentaires : le randori et le Kata, afin de développer le Seiryoku Zenyö et le Jita Kyöei.

À ce stade, pour nous occidentaux, qui aurions un esprit cartésien, nous devons lire « acquisitions techniques » et non Kata. En effet, des asiatiques appliqueront ce qui est imposé par ‘l’ancien’ en lui faisant une totale confiance. Des occidentaux voudront ‘comprendre’. C’est ainsi que lorsque JIGORO KANO est venu en France en 1889, il n’a eu aucun succès. Il en fut de même pour ISHIGURO en 1924. Il a fallu attendre 1934 pour qu’un scientifique de renom, M. FELDENKRAIS, fasse venir d’Angleterre MIKINOSUKE KAWAISHI 4e Dan, pour que le Jùdô connaisse un certain succès dans un premier temps auprès des adultes et principalement du monde estudiantin (Camus, Joliot Curie etc.). Ce japonais a donné des repères : les techniques étaient apprises en statique, UKE passif, elles étaient nommées par numérotation (1re de jambe, 2e d’épaule etc.) et surtout, il a ‘importé d’Angleterre’ les grades de couleur alors qu’au Japon on restait Ceinture Blanche des années avant de devenir marron puis Noire.

Les grades intermédiaires restent fondamentaux quant à l’intérêt du pratiquant (à telle enseigne qu’ils sont maintenant usités au Japon). Certes on utilise la terminologie japonaise
(avec traduction) ce qui favorise l’universalité du Jùdô. Mais nous devons aussi conserver les préceptes de JIGORO KANO et appuyer l’enseignement sur les acquisitions techniques, plus tard le Kata, et le deuxième fondamental préconisé par JIGORO KANO : le Randori. Ce cheminement permet de donner au Jùdô son sens profond : les trois constantes de l’activité.

> le SHIN (esprit de combat et détermination à mener à terme ce qui a été librement entrepris) qui est l’illustration du SEIRYOKU ZENYÖ
- le GI (la connaissance technique)
- le TAÏ (la valeur physique). Non pas dans un but individualiste mais avec un souci constant d’entraide et de prospérité mutuelles : JITA KYÖEI.

Nous autres occidentaux pourrions traduire par : le Savoir au service du Vouloir faire dans la mesure où l’on dispose du Pouvoir faire.

Le savoir ne peut s’inventer et exige travail, attention, compréhension, autant de concepts qui correspondent au Seiryoku Zenyo. Un bon apprentissage ne peut admettre la passivité de son étudiant. Le Jùdô est le support essentiel à cette prise de conscience par le fait qu’il ne peut être pratiqué qu’avec et par un partenaire. Respecter ce dernier implique le sérieux de cette prise de conscience. Le rôle du professeur réside dans cette honnêteté intellectuelle : apprendre un Jùdô juste. L’étude des KATA, qui viendra aussi mais dans un deuxième temps, privilégie cette nécessité par la recherche d’harmonie du couple mise en évidence dans l’expression des rôles actifs de chacun et non par la réalisation d’un mime.

Le RANDORI, intervenant après l’étude des techniques, concours à la recherche des mêmes objectifs. L’étude des techniques est le temps où l’on pratique avec l’autre pour faire le Jùdô (et non pour faire du Jùdô) . Vient ensuite le temps où l’on pratique contre l’autre afin de constater ses propres progrès et sans idée de classement, il implique la connaissance technique et la condition physique. Il doit donc être axé sur l’attaque et la prise d’initiative avec acceptation de la chute et non son refus, les bras sont des instruments d’attaque et non de défense. Viendra après le temps du SHIAI ou championnat qui permettra de se situer par rapport aux autres, et demandera en plus la tactique.

Un troisième temps marque le Jùdô celui où l’on pratique pour les autres, l’idée fondamentale de JIGORO KANO reposant sur la nécessité de retransmettre aux plus jeunes ; c’est une des raisons pour lesquelles il a pensé la pérennisation des techniques par les Katas.

Faire effort pour apprendre et le vouloir, se donner les moyens de constater ses progrès et y puiser le courage de persévérer, vouloir prendre conscience du niveau où l’on se situe par rapport aux autres et faire tout ça dans le respect des autres n’est certainement ni anachronique ni obsolète ! En suivant bien des procédés il est peut-être possible d’y parvenir mais le Jùdô est à coup sûr le moyen le plus évident. Pourquoi ?

L’étude des techniques est inépuisable parce que le Jùdô se pratique en Jùdôgi et que la diversité des saisies est sans limite. D’où l’attrait de la perpétuelle découverte. Il est pratiqué à partir des actions et réactions de l’autre et ainsi il impose l’apprentissage de la lecture de l’autre, donc de la prise de conscience de l’importance d’autrui, son respect, prémisse à la tolérance.

Pour toutes ces raisons, le Jùdô reste un procédé d’Éducation facilitant la prise de conscience de l’individu par rapport au groupe dans lequel il vit. Certes, mais dans la mesure où son apprentissage ne s’arrête pas à l’acquisition de l’activité motrice. Elle est indispensable mais surtout doit demeurer prétexte à des règles de vie, à une direction choisie, à une voie à suivre.

D’où le rôle primordial du professeur qui doit inculquer par touches successives cette relation entre l’activité physique et l’enrichissement du comportement de l’individu. Pour JIGORO KANO : « L’ultime but du Jùdô est la perfection de soi-même et par là, la contribution à la prospérité et au bonheur du genre humain. »

La notion de partenaire induira le respect d’autrui, on ne doit rien tenter de dangereux quant à l’autre. « Je ne mettrai jamais assez l’accent sur le fait que ce que je préconise est loin d’être un sport violent ou dangereux. »

La vie au Dôjo sera basée sur cette notion de respect :
- respect du Professeur et des plus gradés que soi
- respect du partenaire que l’on salue avant et après le travail en témoignage de reconnaissance de sa valeur technique
- respect des lieux, par la mise en ordre de ses propres affaires : zooris rangés talons vers le tapis, sac rangé, salle laissée impeccablement propre après utilisation
- respect du tapis en dehors duquel on ne restera jamais nus pieds, que l’on salue en y montant et en descendant en témoignage d’égards pour le travail qui y est, y a été et y sera réalisé
- respect de soi en regard des objectifs que l’on s’est fixé

- respect des horaires et de l’assiduité

- respect des règles de travail : yaku soku geïko, recherche permanente d’attaques dans le déplacement, randori recherche d’attaque sans empêcher le travail de l’autre avec défenses uniquement par esquive et remise, uchi komi avec des consignes strictes quant au rôle de Uke, nage komi sans brutalité

Cette notion du respect des autres ne peut que conduire à la prise de conscience de la considération d’autrui et à l’estime de chacun. L’estime contient les germes de l’amitié puisqu’elle est empreinte de sincérité et de modestie étant donnée qu’elle n’est réalisable qu’à partir du contrôle de soi. Ce contrôle de soi sera évident lorsque après un succès remporté sur un autre, le professeur attirera l’attention du vainqueur sur l’interdiction de manifester sa joie avec exubérance. Le faire serait une démonstration de mépris pour celui qui a perdu !

Ces qualités de sentiment constituent la trame du cheminement de l’élève dans la Voie et sont édictées à partir de la réflexion de deux de nos anciens : s’appuyant sur le Code du Bushido, J.L. JAZARIN a proposé un Code des Ceintures Noires que Bernard MIDAN a repris de façon plus simple et plus à la portée des jeunes pratiquants, largement divulgué par la Fédération : le Code Moral . Plus récemment sous l’impulsion fédérale un groupe de Jùdôka, d’horizons divers, ont permis à E. CHARLOT d’élaborer un document sur les objectifs fédéraux dans ‘La Charte du Jùdô’.

Faire allusion à certains de nos anciens, ce n’est pas écrire l’histoire, car ce sont eux qui l’ont écrite pour nous, mais relater les grandes étapes qui ont jalonné l’épanouissement du Jùdô c’est une forme de respect vis-à-vis de ce qu’ils nous ont légué. Comme il a été dit plus haut laissons l’histoire aux historiens quant à la froide rigueur des dates liées aux faits et ne retenons que les grandes lignes.

À l’époque où JIGORO KANO a proposé le Jùdô Kodokan, des RYU (écoles) de JÙJUTSU existaient et il a fallu qu’il démontre à quel point sa méthode était meilleure. Des tournois ont été organisés opposant entre autre les jùjutsuka de la police à ses élèves. Un des élèves de JIGORO KANO, Shiro Daïgo dit SUGATA SANSHIRO, petit et léger, battait régulièrement ses adversaires grâce à un sutemi dit tempête sur la montagne YAMA ARASHI. C’est ainsi que rapidement la méthode proposée est devenue la seule pratiquée notamment par la police dans un premier temps puis par l’armée. Dés 1911 le Jùdô devient discipline obligatoire dans les écoles et c’est à peu prés le moment où il arrive en Europe en Angleterre et en Allemagne. Il faudra attendre 20 ans pour assister au 1er championnat du Japon.

Dés que KAWAISHI organise ses premiers cours seuls des adultes pratiquent à l’exception d’un jeune garçon : Jean DE HERT qui sera la première C.Noire bis après un boulanger M. COTTREAU. La guerre arrive et KAWAISHI doit repartir au Japon mais il crée le Collège des Ceintures Noires et en son absence on continue à pratiquer, en métropole et en Afrique du Nord.

À l’issue des hostilités, le Jùdô est interdit au Japon ainsi que tous les Arts Martiaux. Fort heureusement le Général MAC ARTHUR qui avait une certaine connaissance de la culture nippone va autoriser le Jùdô dans la mesure où il ne soit présenté que comme Sport. Petit à petit les universitaires reprennent sa pratique et une émulation s’installe inter-Université.

En France KAWAISHI revient 7e Dan et le Jùdô français a grandi au point qu’en 1947 la Fédération Française de Jùdô voit le jour alors que jusque là seule existait la Fédération de Lutte. Deux tendances se développent : l’une essentiellement orientée vers le Jùdô-Sport et l’autre voulant aller vers l’aspect seulement éducatif. Jusque vers les années 50 seules des discussions s’opposent puis une scission éclate. KAWAISHI voulant se renforcer fait venir un redoutable compétiteur SHOZO AWAZU qui devient son assistant et va toujours dans le sens de son aîné.

À la même époque deux professeurs de Jùdô au Japon viennent en France, l’un s’installe à TOULOUSE ISHIRO ABE, l’autre à BORDEAUX HAKU MICHIGAMI. Plus jeunes que KAWAISHI ils se refusent de s’opposer véritablement à lui mais leur enseignement basé sur les déplacements, les actions réactions ouvrent des horizons nouveaux aux combattants les plus légers.

Les tendances Collège et Fédération vont finir par se rapprocher dans les années 70. La Fédération toutefois dans les années 60 à 70 est gérée en partie par un certain Robert BOULAT Directeur Technique National qui marque son passage par de nombreuses innovations : il œuvre pour les catégories de poids, il crée les postes des premiers Conseillers Techniques Régionaux : Bernard MIDAN pour le Sud Est, Maurice DEGLISE pour le Sud Ouest Raymond ROSSIN pour la Normandie et l’Ouest, Georges GRESS pour le Nord et l’Est. Au niveau des championnats il imagine les principes de repêchage croisé et du double repêchage. Assez piètre Jùdôka mais d’une valeur humaine extraordinaire, tous ses élèves, avec respect mais une grande affection, le nommaient toujours « le père BOULAT. »

Tout au long de ces années le Jùdô français a bénéficié de la présence d’hommes d’exception que ce soit parmi les élus : les BONNET MAURY, COLLARD, PFEIFFER, BERTHELOT, VIAL … en tant que compétiteurs H. COURTINE, B. PARISET nos premiers grands champions. Puis nos premiers champions du Monde J.L. ROUGÉ et en féminine Jocelyne TRIADOU.

Un mot de plus sur J.L. ROUGÉ qui non content d’être notre premier champion du Monde est le seul à être passé de la Haute Compétition au poste de Directeur Technique National puis à celui de Président de la Fédération.

Bien d’autres ont permis au Jùdô Sportif d’acquérir ses lettres de noblesse au Panthéon du Sport . Les citer tous serait très long mais en nommer certains devrait éveiller l’envie d’en connaître plus en allant sur Internet ou sur le site de la Fédération : J. LEBERRE, L. GROSSAIN, S. FEIST, A. BOURREAU, J.J. MOUNIER, J.C. BRONDANI, J.P. COCHE, P VIAL, B. TCHOULLOUYAN, M. ALEXANDRE, A. PARISI, J. TRIADOU, P. FOUILLET, C. FLEURY, C. NOWAK, D. BRUN, C. ARNAUD. M.C. RESTOUX...

CONCLUSION

Le Jùdô au même titre que tous les sports a une valeur éducative indéniable. On ne peut nier qu’il ait un impact particulier.

Dans toutes les spécialités sportives soit le jeu, soit le défi de sauter plus haut ou plus loin ou de soulever plus lourd etc., ont constitué l’élément initial et primordial générant des règles de jeu, un code et au final un Sport auquel on a donné un nom ! Qui dit jouer dit perdre ou gagner. Leur seule raison d’exister réside donc dans l’opposition et leur attrait cesse avec
l’impossibilité physique à la satisfaire.

À l’inverse, le Jùdô est né à partir d’un seul souci : l’Éducation du comportement de l’individu avec pour objectif agir sur le « genre » humain. D’emblée JIGORO KANO a proposé une méthode visant à améliorer les qualités physiques, intellectuelles et comportementales. Pour des raisons secondaires il est devenu un Sport de très haut niveau car sa pratique le permet compte tenu des qualités physiques qu’il demande et qu’il développe, mais il va au-delà par son essence même !

Le rôle du retransmetteur, du professeur, restera donc fondamental dans le cheminement du pratiquant . Ne faire percevoir qu’un des multiples aspects du Jùdô serait impardonnable. Il est très facile de ne développer que l’apport psychologique et de gommer le côté opposition, championnat, il est tout aussi facile de faire l’inverse. (À ce propos il est presque honteux de ne développer que cet aspect prématurément chez des enfants !)

Dans tous les cas ne voir que l’une ou l’autre de ces facettes du Jùdô reviendrait à se placer dans la situation de celui qui irait au restaurant et se contenterait de lire le menu, pour calmer sa faim !

Par définition le professeur est habilité à reconnaître ses élèves aptes à porter un grade. Dans son enseignement, et au moment de l’attribution de ce grade il doit avoir à l’esprit les trois savoirs qui le constituent :

1/ Le savoir faire ?
Il s’agit d’un des éléments essentiels constituant le grade : l’acquisition de la connaissance approfondie d’un volume technique et la maîtrise reconnue dans l’efficacité et l’à-propos de son usage, en un mot la compétence . Y parvenir induit obligatoirement le pouvoir faire : la valeur technique servie par la valeur physique : le GHI et le TAI

Si le grade n’était que cela le Jùdô ne serait qu’un sport parmi les autres : expression d’une maîtrise gestuelle limitée par la longévité du « pouvoir faire ».
Or le grade en Jùdô signifie plus !!!

2/Le savoir-être.
La spécificité du Jùdô ? une activité individuelle qui ne peut être pratiquée qu’avec et par les autres.

N’y voir que l’habileté à faire tomber l’autre reviendrait à identifier le partenaire en tant qu’« engin » à maîtriser. Faire le Jùdô c’est prendre l’autre en considération ! constater ce qu’il est et non imaginer ce qu’il pourrait ou devrait être.

Chercher à « comprendre » l’autre, l’observer, réaliser en fonction de ce qu’il est, en un mot apprendre à le lire. On peut affirmer que faire le Jùdô consiste à être avec et à partir des autres.

Être c’est vivre dans un milieu, le faire évoluer en se fondant au sein d’un groupe. Le Jùdô en est l’ÉCOLE privilégiée. Prendre les autres en considération conduit à l’estime génératrice de l’amitié, à la recherche de vérité, à l’intransigeance sur soi et au refus d’agressivité vis à vis des autres.

Raisonner de la sorte constitue « l’esprit Jùdô », le SHIN ou combat de soi sur soi, quête du faire plus pour faire mieux en tout, principe de rigueur.

Afin d’y parvenir plusieurs étapes jalonnent une vie de Jùdôka : la première c’est faire AVEC l’autre. L’habileté venant la deuxième se fera CONTRE l’autre, afin de constater les progrès. L’opposition ne demandera alors que technique et valeur physique : c’est le RANDORI. Il ne s’agira que de recherche d’efficacité par la diversité dans les techniques et les déplacements. Viendra ensuite le positionnement dans une hiérarchie par rapport aux autres, c’est encore du Jùdô CONTRE l’autre mais l’objectif sera de « gagner ». C’est le championnat qui nécessite les mêmes qualités auxquelles s’ajoute la notion de tactique.

Toutes ces phases exigent le pouvoir faire or celui-ci est limité dans le temps. Tout naturellement, grâce au Shin le Jùdôka continue à vouloir apprendre et entre dans une autre phase : faire le Jùdô pour les autres. C’est là que la maxime d’entraide et prospérité mutuelles prend toute sa résonance !

3/le savoir paraître.
Il s’agit là d’un savoir négatif, l’important est de savoir ne pas paraître.
Un travers de notre société consiste à clamer : « Ma position, mon âge, mon grade, ma situation….. me donnent le droit de… » l’orgueil, la satisfaction de soi ne sont pas générés par le Jùdô….. bien compris et donc bien vécu. Le grade implique des devoirs bien plus que des droits. Le respect est inspiré mais il n’a pas à être demandé. Sont respectés ceux qui par leurs attitudes et leurs comportements démontrent plus que par des mots.


QUELQUES APHORISMES

Le grade doit être considéré comme symbole de la reconnaissance de compétence, reconnue par des plus haut gradés et non comme celui de récompense !

« L’ultime but du Jùdô est la perfection de soi-même et par là la contribution à la prospérité et au bonheur du genre humain. Prospérité et bienfaits mutuels est la phrase qui représente le domaine de l’idéal du Jùdô, le but suprême, lequel peut être atteint seulement par ceux qui ayant maîtrisé l’art et l’esprit de combattre, ont dépassé toute notion de victoire et de défaite. »

« Aussi longtemps que vous le pouvez, vous devez vous adapter à votre adversaire et combattre de manière à ce qu’il puisse librement utiliser son waza contre vous. »

« Si vous ne gagnez pas en utilisant un waza supérieur à celui de votre adversaire ou en retournant son waza contre lui, votre victoire ne peut être considérée comme une authentique victoire . »

LA CULTURE

QU’EST-CE QUE LA « CULTURE JÙDÔ » ? Le terme de culture recouvre plusieurs sens. Dans le langage courant, la culture est associée à un corpus de savoirs : par exemple, on qualifie de cultivée la personne qui connaît et apprécie la musique, la littérature ou le théâtre. On évoque parfois la culture scientifique ou professionnelle. La culture révèle également une appartenance ou des origines, l’adhésion à des valeurs et certains comportements, c’est en ce sens qu’on allègue de la culture musulmane, laïque ou républicaine. La « Culture Jùdô » relève de toutes ces acceptions, elle s’apparente à l’élément SHIN de la trilogie SHIN GHI TAI :
esprit, technique, physique, autrement dit vouloir, savoir, pouvoir. Édouard Herriot définissait la culture comme « ce qui reste lorsqu’on a tout oublié ». Bien qu'on ne puisse réduire la « Culture Jùdô » à cette formule désespérante, il faut bien admettre que c'est bien ce qui subsiste quand le physique nous abandonne et que la technique ne peut plus s’exprimer. Encore faut-il que le Jùdôka en ait inspiré sa pratique quotidienne. Partie intégrante de notre activité, la « Culture Jùdô » s’en distingue et distingue celle-ci des autres sports. Le premier pilier de la « Culture Jùdô » est à mon sens l'étiquette dans le Dôjo ou Reigisaho, expression raffinée la spiritualité de base de l’Asie, avec sa principale manifestation :
le salut qui symbolise le respect, dû à soi-même, à l’activité, au lieu, aux Maîtres, aux partenaires. Contrairement au Code moral qui se décline en concepts, l'étiquette Jùdô se passe de mots sans perdre sa valeur éducative. Le Dôjo, lieu consacré à l’étude de la voie, est séparé de l'espace commun. Traditionnellement, il obéit à des règles concernant son orientation. Celle-ci a une signification symbolique: Au nord, le côté honorifique, dit Kamiza ou Shomen est décoré d’un portrait de Jigoro Kano. Le Maître, dos au kamiza, face au sud reçoit la lumière du soleil, symbole de la connaissance qu'il doit transmettre. Les élèves ne peuvent voir cette lumière qu'au travers de la réflexion qu'en offre l'enseignant, lequel se doit donc d'être le miroir le plus fidèle possible de la Tradition. Les pratiquants anciens sont du côté du soleil levant (le JOSÉKI) : de par leur ancienneté, ils commencent à comprendre les principes essentiels de leur art, quand les débutants sont encore dans l'ombre à l'occident (Shimozeki).
Le deuxième pilier de la « Culture Jùdô » consiste à connaître les origines de notre discipline, tant l’histoire de l’implantation du Jùdô en France que la biographie de son créateur. Concernant la France, on ne peut méconnaître l’ère KAWAISHI, l’ambiance quasi mystique des débuts, l’apport déterminant des pionniers : les premiers professeurs de Jùdô, enfin l’irruption des enseignants d’EPS et le virage sportif. Le Jùdô est maintenant un sport à part entière. Cent vingt pays participent aux compétitions mondiales. Le Jùdô a été reconnu définitivement discipline olympique à Munich en 1972 pour les hommes, et en 1992 à Barcelone pour les femmes. Mais cette activité est d’abord l’invention d’un homme : un pédagogue et un humaniste génial. Né au milieu du formidable XIXe siècle. Cet homme, Jigoro Kano, eut la chance d’œuvrer sous la restauration du Mikado, lequel sortit le Japon des ténèbres du Shogunat. Jigoro Kano était contemporain de Baden-Powell, le fondateur du scoutisme, et de Pierre de Coubertin restaurateur des Jeux olympiques. Passionné d’éducation, Kano su convaincre les autorités que sa méthode, plus qu’un style de combat, constituait un moyen d’éducation aux trois cultures : physique, intellectuelle, morale. La vie, les écrits, les maximes, SEIRYOKU ZEN YO et JITA YUWA KYOEI, et surtout le formidable développement du Jùdô, témoignent encore de l’universalité de son message.

II. QU’EST-CE QUE LA « CULTURE JÙDÔ » VOUS APPORTE OU PEUT VOUS APPORTER DANS VOTRE QUOTIDIEN D’ENSEIGNANT ? J’ai évoqué plus haut l’aspect SHIN de la « Culture Jùdô », sans abandonner cette notion nous allons maintenant évoquer les deux autres termes de la trilogie SHIN GHI TAI. « La culture Jùdô » ne saurait se limiter à ses aspects rituel, historique ou philosophique. Le quotidien d’un enseignant de Jùdô, est concret et ciblé, 70% de son temps est consacré aux enfants. Cette réalité quotidienne en fait le transmetteur et le garant des valeurs éducatives exposées dans le Code Moral et la Charte du Jùdô français. Elle fait de lui, non seulement un éducateur sportif mais un éducateur tout court. Les connaissances indispensables à un enseignant de Jùdô, sont précises et techniques. On objectera peut-être que la pédagogie, la règlementation sportive, l’arbitrage et l'environnement sportif, la préparation physique, l’anatomie, la biomécanique, appartiennent à la technicité de l’éducateur sportif plus qu'à la culture proprement dite. Pourtant, s’agissant de travail à visée éducative, portant sur l’humain dans sa diversité et sa complexité, il n’est pas abusif de considérer que ce corpus de savoirs compose une culture professionnelle qui abonde et actualise la « Culture Jùdô ». 1. Les enfants. « L’enfant n’est pas un petit homme, c’est un petit d’homme ». Il y a fort à penser que l’étiquette et l’orientation symbolique du Dôjo prennent peu de place dans ses préoccupations d’enfant. Pourtant celle-ci crée les conditions favorisant l’enseignement en tant que « prise en main », elle balise l’action de l’enseignant et assoit son autorité. Qui s’est trouvé confronté, un mercredi soir, à une quinzaine de petits diables en délire, méditera avec profit la citation suivante de Gustave Le Bon : « la compétence sans l’autorité est aussi impuissante que l’autorité sans compétence ». Une pédagogie adaptée aux enfants constitue l’essentiel du « savoir faire/savoir-être» de l’enseignant Jùdô. On ne peut nier en ce domaine l’apport de l’EPS et des sciences de l’éducation en général, nombre de ceux qui ont fait progresser cette matière sont des enseignants d’EPS de haut niveau. C’est un professeur de Jùdô, également professeur d’EPS, Charles Toni, qui le premier, en 1950, mit au point une méthode de pré-initiation et écrivit un livre sur le sujet. Il fallut attendre 1967 pour que la F.F.J.D.A. se dote d’un outil évolutif : « La progression française de Jùdô des 6/14 ans ». Auparavant les enseignants disposaient des références pédagogiques suivantes: 1. Le Gokyo, 5 séries de 8 techniques fixées par Jigoro Kano en 1895. 2. Ma Méthode de Jùdô, 167 techniques numérotées, par Mikinosuke Kawaishi 1955. 3. Les cahiers Techniques et pédagogiques de la FFJDA élaborés par les plus grands noms parmi les professeurs de Jùdô de l’époque : Henri Courtine (premier dixième dan français en 2007), Bernard Pariset, Guy Pelletier (9e dan en 2007), Georges Baudot, Claude Urvoy, (Paul) Andrieu. Aucun de ces outils pourtant très élaborés n’étant spécialement adapté aux enfants, la FFJDA a constitué en 1976 des groupes de travail consacrés à la mise au point de l’enseignement du Jùdô aux enfants. À ce jour 4 ouvrages fédéraux se sont succédés dans le temps :
1.Approche pédagogique des 6/9 ans, qualifié par certains de pré-initiation, par opposition à l’âge d’or des apprentissages, de 9 à 12 ans. Cet ouvrage fut coordonné par Daniel Roche.
2. L’éveil Jùdô des 4/5 ans.
3. L’initiation au Jùdô des 6/8 ans.
4. Le Jùdô des 15/17 ans, pratique et entraînement. De nombreux enseignants de Jùdô, d’EPS, athlètes de haut niveau, et diplômés d’université (sciences de l’éducation, psychologie, STAPS) y ont contribué. En effet, la stratégie de l’enseignant doit tenir compte des caractéristiques de l’enfant en fonction de son âge : capacités cognitives, bioénergétiques et bio mécaniques, temps de concentration limité, régulation thermique peu efficace, immaturité du système immunitaire, basse régulation glycémique. Au plan de la motivation, un des apports les plus représentatifs de la « Culture Jùdô » est l’attribution des ceintures, remises selon le protocole, à deux mains. Les ceintures de couleurs, dont l’invention est attribuée à tort à M. Kawaishi, imitées du billard anglais, matérialisent la progression. Les grades utilisés dans la plupart des arts martiaux aujourd’hui sont, comme en Jùdô, les « kyu » et les « dan ». Il s’agit d’une invention de Kano, mise en place dès l’ouverture de son école, le Kodokan, en 1882. Ce système a eu tellement de succès que les autres arts martiaux l’adoptèrent. Il n’est pas abusif de dire que, même aujourd’hui, la ceinture noire est perçue par le grand public comme un symbole fort de notre discipline.
Les adultes. S’adressant à des adultes, l’enseignant doit s’adapter à des attentes diverses. Selon l’âge et la motivation de chaque personne, le professeur se fera enseignant, animateur, entraîneur, soigneur, organisateur, autant de facettes qui requièrent des compétences multiples, et en tout cas pratiques. Après les enfants, prédominance est donnée au Jùdô sportif. La rupture est intervenue en 1961, Anton Geesink, par ailleurs excellent Jùdôka, mais d’un gabarit hors normes pour l’époque, bat Sone en finale du championnat du monde à Paris. Le Jùdô magique, l’art souple, a vécu. Le petit ne bat plus les gros. En 1962, lors d’une tournée en URSS, la sélection française se fait laminer par des Jùdôkas soviétiques issus du Sambo. À Tbilissi, Kiev et Moscou, tous les français sont battus par des sportifs dont la condition physique exemplaire compense la seule technique. Seul Lionel Grossain – neuvième dan à ce jour – tire son épingle du jeu et passe pour un extra terrestre aux yeux des samboïstes parce qu’il avoue ne s’entraîner que trois fois par semaine. S’ouvre alors l’ère des catégories de poids, des stages intensifs, de la musculation, des kimonos carapace au col insaisissables. Les randoris se confondent avec les shiaï, et les shiaï s’apparentent à la lutte géorgienne. Je ne dénie pas au sport sa valeur éducative, ni à l’olympisme son idéal civilisateur. Le mouvement sportif et olympique est à l’origine de textes édifiants qui relèvent de la culture humaine :

1. Code sportif : Se conformer aux règles du jeu Respecter les décisions de l'arbitre Respecter les adversaires et partenaires Refuser violence et tricherie Maître de soi en toutes circonstances Loyal dans le sport et dans la vie Être exemplaire, généreux et tolérant.
2. Esprit sportif : Équité Loyauté Désir de vaincre, savoir Perdre. En outre les préparations physique et psychologique sont des sciences à part entière. Mais il suffit de lire les écrits de Jazarin, Feldenkrais, Habersetzer, et plus, récemment les traductions de Jigoro Kano par Yves Cadot, pour constater que tout un pan de la «culture du Jùdô» telle qu’elle fut honorée en France jusqu’en 1960 a disparu. Jigoro Kano avait imaginé une pratique pour la vie entière. La disparition des
ceintures noires, passé le temps de la compétition démontre que quelque chose s’est perdu. L’entraînement s’est durci mais il s’est appauvri. Pratique-t-on encore le kakari geiko, le yaku soku geiko en souplesse ? Dans les débuts du Jùdô, l’espoir de réussir tenait en un mot : la répétition. On nous inculquait la croyance que l’efficacité tenait au nombre de répétitions, l’exercice qu’on nommait Butsukari et qui diffère notablement de l’Uchi Komi rythmé et percuté n’a plus la faveur des professeurs et donc de leurs élèves. Dans les années 2002 / 2003, un cadre national Patrick Roux avait été chargé du « projet Jùdô ».
Il s’était employé à restaurer les pratiques éducatives traditionnelles : Mondo, Kata, randori, kakari geiko, yaku soku geiko, uchi komi, tandoku renshu, nage komi, butsukari, pratiques spécifiques au Jùdô préconisés par Kano lui-même, comme procédés favorisant l'apprentissage. Qu’est il advenu de ces bonnes intentions. Comment le Jùdôka doué d’un physique moyen, peut il s’exprimer en Jùdô, après une dure journée, si la pratique du « randori souple » n’est valorisée que durant 5 minutes le soir de la cérémonie des vœux ? À défaut d’avoir apporté les réponses aux deux questions posées, permettez-moi de formuler à mon tour la problématique suivante : Quand, pour « faire du chiffre » on aura exploité successivement tous les filons : les enfants, les compétiteurs, les adultes, les séniors, le Taï so, le Jùjutsu, et maintenant le Ne Waza Brésilien, s’apercevra-ton enfin que tout était déjà contenu, dans le Jùdô, avant que par facilité ou par ignorance on ne le dépouille des richesses qui faisaient son originalité. Il est temps de rassembler ce qui est épars et de se réapproprier ce qui constitue notre « Culture Jùdô ».

Meilleurs Voeux ! KAGAMI BIRAKI C’est ainsi chez les Hommes, les moments essentiels de la vie sont marqués par des fêtes. Cette fête, qui nous réunit en début d’année, c’est la cérémonie des vœux instaurée pour la première fois en France par Jean-Lucien Jazarin alors Président du Collège National des Ceintures Noires, le 9 Janvier 1965. On appelle parfois cette cérémonie : « Soirée Shin », en rappel de l’élément SHIN de la trilogie SHIN GHI TAI : SHIN : Vouloir recruter toute la force de son esprit, GHI : Savoir affiner inlassablement sa technique, TAI : Pouvoir respecter son corps et rester dans les limites de son potentiel physique. C’est le Shin qui caractérise ce qu’il est convenu d’appeler « la Culture Jùdô ». En effet, partie intégrante de notre activité, la « Culture Jùdô » s’en distingue et distingue celui-ci des autres sports. Elle est fortement imprégnée de la culture nippone. Au Japon la cérémonie des vœux est appelée Kagami Biraki, qu’on peut traduire par : « Ouvrir le miroir » ou « Polir le miroir ». C’était à l’origine un des rites pratiqués dans les familles de la noblesse d’épée. Lors de cette cérémonie, les participants échangeaient des galettes de riz représentant le miroir dans lequel ils devaient se regarder pour faire un point sur l'année écoulée. Le bilan étant fait, polir le miroir prend valeur d’acte purificateur, c’est une sorte de rejet du passé, par lequel on efface ses erreurs, mais aussi ses regrets et ses remords. Il faut maintenant Regarder la Vérité en face ! Le miroir poli, nettoyé, rappelle qu’à chaque jour suffit sa vérité et sa peine. La conscience ainsi apaisée, lisse comme un miroir, le Bushi, comme le Jùdôka peut adopter la posture traditionnelle qui caractérise la nouvelle année : la prise de bonnes résolutions. Au premier rang de celles-ci, je recommande à votre attention le trésor de notre « Culture Jùdô »: le respect de l’étiquette. La codification des gestes et du cérémonial de la politesse encadre la vie au Dôjo. Élément primordial de l’étiquette, le salut symbolise le respect dû à soi-même, à l’activité, au lieu, aux Maîtres, aux partenaires. Contrairement au Code moral qui se décline en concepts, l'étiquette Jùdô se passe de mots sans perdre sa valeur éducative. Cette étiquette, enseignée dès l'enfance, permet de discipliner les passions, elle rend possibles et agréables les rapports sociaux. Dans les Dôjo elle a la même utilité mais, en plus, elle peut faire éclore en chacun les sentiments qui correspondent aux gestes et au cérémonial. De même qu'une attitude grossière, le laisser-aller, les positions négligées ou désinvoltes favorisent les sentiments bas et vulgaires, de même, une attitude noble, correcte, respectueuse, favorise l'épanouissement de sentiments nobles et élevés. Le Dôjo lui-même, lieu séparé de l'espace commun, obéit à des règles d’orientation portant une signification symbolique comme on l’a décrit précédemment. L'enseignant, dos au kamiza, face au sud reçoit la lumière du soleil, symbole de la connaissance qu'il doit transmettre. Les élèves ne peuvent voir cette lumière qu'au travers de la réflexion qu'en offre l'enseignant, lequel se doit donc d'être le miroir le plus fidèle possible de la Tradition. La fête saisonnière du Kagami que nous célébrons chaque année rejoint la tradition universelle, proche du solstice d’hiver elle rappelle le culte de Janus aux deux visages pratiqué par les Romains elle porte le témoignage de croyances transmises par nos anciens comme un miroir offert à notre contemplation. La nature étiolée témoigne de la puissance des ténèbres, et pourtant le soleil a dépassé le point astronomique à partir duquel il reprend son ascension. C’est l’annonce du réveil de la nature endormie. Symbole de renaissance, il nous délivre un message d’espoir : l’homme nouveau de la nouvelle année peut surgir du « vieil homme de l’année passée ». J’ai beaucoup parlé du Kagami, le miroir. Que ce miroir tendu apporte à chacun les bonnes réponses, et à défaut de réponses, de bonnes questions.

CIVISME et JUDO (Louis COMBES)

À l’énoncé du terme Jùdô on pense Sport. Dire que le Jùdô soit pourvoyeur de médailles Mondiales et Olympiques n’est pas une découverte : depuis 1973, derrière Jean Luc Rougé, vingt Champions du Monde et huit Champions Olympiques. Vingt-quatre Championnes du Monde et six Championnes Olympiques.

Cependant KANO JIGORO, fondateur de la discipline, lui a donné une signification précise « L’ultime but du jùdô est la perfection de soi-même et par là la contribution à la prospérité et au bonheur du genre humain. Si nous rapprochons sa définition de celle que nous accordions à la notion de civisme nous sommes en droit de trouver des points de concordance « le civisme désigne le respect des êtres et des lieux, l’attachement à la collectivité à laquelle appartint l’individu et au rôle qu’il y joue. » Jusqu’où vont ces concordances ?

Peut-on dire qu’il nous ait légué un moyen d’éducation civique auquel avons ajouté l’Olympisme ? En fin pédagogue il a exprimé ses objectifs et la manière de les mener à terme : « J’ai divisé le Jùdô en méthode de combat, méthode d’entrainement et processus de développement moral et intellectuel applicables à la vie de tous les jours » Entrouvrons la porte d’un Dôjo et observons ! Si dans la plupart des Sports le principe consistent à maitriser un engin, en Jùdô l’engin est un autre soi-même doté aussi de quatre membres et d’une tête. Si dans certaines disciplines il est possible de n’aborder la technique que petite à petit, il est plus prudent en Jùdô d’agir différemment. . Ceci étant admis l’aventure du Jùdô peut commencer et se développer en quatre paliers. Le Jùdô Avec l’autre, les deux s’entraident pour comprendre et réaliser la technique sans opposition, ce qui favorisera l’importance du rôle de chacun et de sa part de responsabilité. D’où la prise de conscience de l’entraide propice à découvrir ensemble, à réaliser et construire. Appliquer ces principes à la vie de tous les jours peut bien être considéré comme du civisme. Le citoyen est bien responsable de ses actes. Viendra le Jùdô PAR l’autre sans esprit de victoire c’est la recherche d’efficacité en opposition seulement orientée vers l’attaque (ce qu’on appelle le Randori) Mutuellement nous nous corrigeons et cherchons à faire mieux que l’autre mais en observant nos connaissances technique. C’est le temps de la « lecture» de l’autre, celui au cours duquel « j’apprends » à le voir t’el qu’il est et à l’admettre pour et comme il est et non pas comme mon imagination peut me le dépeindre. Je jùdôka citoyen voit les gens et les situations de la vie dans leur réel et non au travers d’une imagination défavorable. Le citoyen se doit d’être tolérant. Lui succéde le Jùdô CONTRE l’autre. C’est le temps des craintes à surmonter, des doutes à effacer de la prise de conscience de mon réel niveau par rapport aux autres et où je me situe dans ma société. Le Championnat me permet de me connaitre vraiment. La dernière étape à franchir sera celle du judo pour les autres en aidant les plus jeunes, les moins gradés en un mot en m’identifiant par rapport à mon environnement. Le citoyen se trouve missionné au sein de son groupe.

Pourquoi aborder aujourd’hui (trop succinctement !) ce qui se trouve derrière le rideau des résultats sportifs ? Les derniers Championnats du Monde ont actualisé le Jùdô et il me semble souhaitable de préciser certaines réalités pour éviter l’amalgame entre une simple activité physique et un legs dont nous avons hérité. Si vous êtes tentés d’aller plus avant choisissez un club, à tout âge et à toute époque de l’année vous pourrez toquer à la porte.

Louis COMBES

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